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procédés qu’ils emploient pour prévenir le vagabondage en recueillant les enfans qui y seraient infailliblement livrés. Chacun suit la méthode qui convient le mieux à son génie et à ses mœurs. C’est en étudiant dans la seconde partie de ce travail la manière dont la législation anglaise réprime le vagabondage des enfans à sa naissance que nous aurons à recueillir plus d’une utile indication.


II.

La législation anglaise relative aux jeunes délinquans mérite d’autant plus d’être étudiée de près qu’elle ne laisse pas de donner lieu à des appréciations assez diverses. Dans des publications récentes, cette législation nous a été proposée comme un modèle, et on a fait honneur aux Anglais d’avoir supprimé la prison dans le traitement des jeunes délinquans. En Angleterre, au contraire, l’auteur d’un livre intéressant intitulé Current Coin (Monnaie courante), où quelques-unes des misères sociales de ce beau pays sont vigoureusement mises à nu, reproche à ses concitoyens de continuer à soumettre les enfans à la peine barbare de l’emprisonnement. Le secret de ces contradictions est dans la complexité des dispositions qui règlent le sort des jeunes délinquans, et qui sont rarement envisagées dans leur ensemble. C’est cet ensemble que je voudrais examiner en complétant des indications précises, tirées du texte même des actes législatifs, par quelques appréciations personnelles qu’une visite attentive m’a suggérées.

Trois documens législatifs principaux régissent actuellement la condition des jeunes délinquans en Angleterre. Le premier en date, et le moins connu, est un acte du 22 juillet 1847, désigné dans la pratique sous le nom de juvenile offenders act. Pour bien comprendre la portée de cet acte, il faut se rappeler que d’après la procédure criminelle anglaise les infractions (offences) sont de deux natures : celles qui donnent lieu à une instruction (indictable offences), dont la poursuite a lieu devant les assises, et celles qui sont jugées sommairement (summarily convicted) par deux juges de paix au moins siégeant en petites sessions (petty sessions), ou par un magistrat salarié (stipendiary magistrate) qui, dans certains districts (généralement les grandes villes), est investi de pouvoirs équivalons à ceux des juges de paix. Au nombre des indictable offences figure en principe le vol simple, larceny, c’est-à-dire une des infractions dont les enfans se rendent le plus fréquemment coupables. On était donc obligé de les traduire devant les sessions trimestrielles des assises, ce qui entraînait, pour des infractions souvent insignifiantes, des longueurs et des complications de procédure. Depuis