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LA VIE ET LA MATIERE

I.
LE MÉCANISME.

Le grand débat entre le matérialisme et le spiritualisme qui remplit toute l’histoire de la philosophie peut-il être considéré comme véritablement clos, soit par la victoire définitive de l’une ou de l’autre de ces écoles, soit par la solution négative du scepticisme positiviste ? Il est permis d’en douter, à voir avec quelle ardeur et quelle confiance les trois écoles discutent ce grand problème. Serait-ce une de ces éternelles questions auxquelles l’esprit humain est condamné à penser toujours, sans jamais rien savoir de certain ? Nous nous refusons à croire à cette impuissance radicale, quoi qu’en disent les positivistes, et nous trouvons dans l’histoire des solutions diverses de ce redoutable problème des raisons d’espérer que la philosophie en viendra à bout avec le concours des sciences elles-mêmes. En attendant, tout historien intelligent des doctrines émises sur ce sujet peut constater un vrai progrès dans la manière de poser les problèmes et de résoudre les questions qui s’y rattachent. Grâce aux efforts de l’esprit philosophique, grâce surtout aux progrès des sciences de la vie, il est manifeste que, si la philosophie actuelle ne tient pas encore tout à fait le mot de l’énigme, la formule précise qui doit rallier et fixer les bons esprits de toutes les écoles, elle s’en rapproche de plus en plus par la rigueur de sa méthode et la précision de son langage. Philosophes et savans s’accordent à peu près en ce moment à abandonner les vieux mots, trop vagues pour se prêter à l’exactitude scientifique, et à se servir de termes plus simples et plus propres à l’expression pure des phénomènes de la vie et de l’intelligence.