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gens. Permettre à l’enfant de quitter l’école quand il a acquis un minimum de connaissances, c’est l’enlever à l’instruction au moment où elle lui allait devenir le plus profitable. C’est faire considérer l’école comme une punition qu’on inflige aux moins zélés ou aux moins doués. C’est exposer l’instituteur aux sollicitations et aux récriminations des parens, et non pas toujours des plus pauvres, réclamant leurs enfans pour les travaux manuels. C’est méconnaître le lien qui existe entre l’âge et l’instruction, car les connaissances, pour être sûrement acquises et pleinement possédées, ont besoin que l’esprit ait une consistance qui ne vient qu’avec les années. Nous croyons donc que la loi fera sagement d’établir une limite d’âge qui n’exclura pas d’ailleurs la nécessité d’une certaine somme d’instruction. Dans les pays protestans, où la première communion se fait à treize ou quatorze ans, cette cérémonie religieuse donne naturellement la limite. Différentes raisons nous prescrivent en France de fixer nos prétentions un peu moins haut. Mais ce ne sera pas trop exiger que de placer les années obligatoires entre sept et douze ans révolus. La grande différence entre ceux qui ont été au collège et ceux qui ont dû se contenter de l’école primaire réside encore moins dans la nature que dans la durée de l’instruction qu’ils ont reçue : en deçà d’un certain minimum de temps, les connaissances ne fructifient point ; elles ne restent même pas dans l’esprit.

Il est à désirer, en outre, que l’enseignement primaire, comme celui des lycées et des facultés, puisse assurer à ses meilleurs élèves certains avantages : telle est la signification du certificat d’études, institution excellente qui a été accueillie avec faveur par les maîtres et par les familles. Comme on ne peut songer à accorder des avantages positifs et immédiats pour d’aussi modestes examens, il faudrait au moins en assurer d’indirects et par voie d’élimination. Ainsi les administrations de l’état, à partir d’une certaine époque, n’accorderaient point de place à qui ne serait pas pourvu du certificat d’études primaires. On peut croire que les grandes compagnies, les grandes usines ne tarderaient pas à suivre cet exemple, sinon pour les ouvriers, du moins pour leurs gradés inférieurs. Mais c’est surtout en assurant sous les drapeaux certains avantages aux possesseurs de ce diplôme qu’on lui donnerait aux yeux des populations une véritable valeur.

D’un autre côté, le certificat d’études est un moyen pour exciter l’émulation des instituteurs et pour juger la valeur de leur enseignement, à la condition toutefois qu’on estime le maître non d’après quelques élèves d’élite, mais d’après la moyenne des compositions. Il y a encore d’autres précautions à prendre : on sait que le nombre