convictions raffermies par ces deux grandes autorités, Bayfius et Stewechius, à vaincre des scrupules qu’entretenait encore la résistance opiniâtre d’un savant espagnol du XVIIIe siècle, don Antonio de Capmany y de Monpalaù, savant qui se connaissait en galères presque aussi bien que le capitaine Barras de la Penne, si un marin comme moi et un critique plus autorisé que je n’ai jamais eu l’espoir de l’être, M. Jal, en un mot, n’eût jugé à propos de prendre parti contre Barras de la Penne et contre Antonio de Capmany, contre Bayfius et contre Stewechius. Suivant M. Jal, « thalamos n’a rien de commun avec thalassa. — C’est la chambre du triérarque ; — thranos, c’est le siège du capitaine ; zygos, c’est la poutre principale qui, au maître couple, servait de liaison aux deux côtés du navire. » Bien des savans ont disserté sur la marine des anciens ; M. Jal seul a eu la bonne fortune de pouvoir faire construire, d’après les données que lui avaient fournies ses laborieuses recherches, un navire antique. La trirème qu’édifia, sous les yeux de l’auteur de la Vie de César, le grand ingénieur qui venait de renouveler la face de notre matériel naval, avait cent trente rames maniées chacune par un homme, trois cents hommes d’équipage, 39m,25 de longueur à la flottaison, 5m,50 de largeur au maître-bau, 2m,18 de creux et 220 tonneaux de déplacement. La trirème a marché, tout Paris l’a pu voir, et l’érudition allemande s’est elle-même déclarée satisfaite. L’empereur seul paraît avoir, si mes informations sont exactes, conservé encore quelques doutes. Quoi qu’il en puisse être, il est à peu près admis aujourd’hui que les trirèmes romaines « étaient des vaisseaux à deux mâts et à trois rangs de rames manœuvrées par cent soixante-dix rameurs. » Au rang supérieur voguaient soixante-deux thranites, cinquante-quatre zygites au rang du milieu, autant de thalamites au rang inférieur. Chaque rame était maniée par un seul homme. Les trous n’étaient pas percés verticalement les uns au-dessus des autres ; ils étaient disposés en échiquier. Le thalamite se trouvait assis sur le pont même et tout près du bord. Le trou dans lequel manœuvrait sa rame s’ouvrait presque au niveau du pont et deux pieds à peine au-dessus de l’eau. Quatorze pouces plus rapproché de la proue et quatorze pouces plus haut que la rame du thalamite, on rencontrait le sabord de nage du zygite ; Le zygite n’était pas assis, comme le thalamite, à plat-pont ; il avait un banc d’où il pouvait faire agir sa rame dans l’angle formé par la tête et par le bras du thalamite qui voguait devant lui. Une plate-forme s’étendait, pour l’usage des thranites, d’un bout de la trirème à l’autre, faisant légèrement saillie en dehors de la muraille, passant au-dessus de la tête des thalamites et s’arrêtant en dedans du navire, à l’épaule des zygites. Ce dernier rang de rames ne devait pas avoir plus de cinq pieds d’élévation
Page:Revue des Deux Mondes - 1878 - tome 30.djvu/777
Apparence