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Page:Revue des Deux Mondes - 1879 - tome 31.djvu/336

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posthume où l’on voit que l’herbe d’un pré descend quelquefois à 10 degrés plus bas que l’air qui est au-dessus. À cette époque vivait à Londres un médecin du nom de Ch. Williams Wells, peu connu comme médecin, ni bon ni mauvais, profondément atteint dans sa propre santé et trompant les tristesses de la maladie par l’étude des sciences physiques. Lui aussi, de son côté et à la même époque, dans un jardin de Surrey qui appartenait à l’un de ses amis, lui aussi, dis-je, avait eu l’idée de mesurer la température de l’herbe, et, comme les précédens observateurs, il l’avait trouvée de 4 à 5 degrés inférieure à celle de l’air pendant les nuits sereines de l’automne. Ne connaissant point les recherches antérieures de Wilson et de Six, il se disposait à publier les siennes, quand un hasard lui apprit qu’il avait été devancé. Il se le tint pour dit, se tut et attendit. Ce qui paraîtra bien étonnant, c’est que tous les trois semblent avoir ignoré les recherches de Le Roi, dont ils ne parlent point. Ils reconnaissent que le froid de l’herbe est accompagné de rosée, que ce sont des effets toujours solidaires et inséparables, et ils s’accordent encore pour admettre sans raison ni logique que le froid est la conséquence de la rosée, sans même examiner la question de savoir si ce n’est pas l’inverse qui est vrai, si le froid n’est pas la cause de la rosée.

Wells attendit jusqu’en 1813 sans abandonner ses études, sans cesser d’avoir toujours le même sujet présent à la pensée. Tout à coup il modifia sa première opinion. « En considérant le sujet avec plus d’attention, je commençai à soupçonner que M. Wilson, M. Six et moi-même avions tous trois commis une erreur en regardant le froid qui accompagne la rosée comme un effet de la formation de ce fluide. En conséquence je repris mes expériences. » Quelle fut la cause de ce changement de front ? Est-ce le fruit de réflexions spontanées de l’auteur ? Ne serait-ce point la lecture des travaux de Le Roi ? Wells connaissait Le Roi, qui était comme lui membre de la Société royale ; il connaissait aussi son mémoire sur la suspension de l’eau dans l’atmosphère, puisqu’il cite le recueil qui le contient et l’année où il fut publié. On peut difficilement supposer qu’il l’ait rappelé sans le lire, et, l’ayant lu, comment expliquer qu’il en ait adopté les conclusions sans dire où il les avait prises ? Je ne veux pas pousser plus loin qu’il ne convient cette enquête rétrospective ; mais il est clair que le silence du physicien anglais ne prouve pas contre les titres de priorité de Le Roi ; il me signifie rien autre chose sinon que le docteur Wells ne les a pas connus ou qu’il avait des raisons pour n’en point parler.

Cette restriction faite, je vais raconter les expériences de Wells, telles qu’il les a publiées dans un opuscule demeuré célèbre, dans