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Page:Revue des Deux Mondes - 1879 - tome 31.djvu/343

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objets par son contact une certaine quantité de chaleur qui les réchauffe et le refroidit. Dans ce mécanisme bien simple, l’air n’aurait donc qu’une fonction, celle d’emmagasiner pendant le jour une quantité de chaleur qu’il enlèverait aux objets terrestres échauffés pour la leur rendre pendant la nuit quand ils sont refroidis. Il n’agirait que par le contact de ses molécules avec leur surface et n’aurait aucune influence d’aucune sorte sur le rayonnement direct. Approximativement c’est bien là son rôle, mais la dernière assertion est-elle rigoureusement exacte ? Wells eut à ce sujet des doutes qu’il a formellement exprimés ; il ne croyait pas l’air absolument diathermane, et qu’il laissât passer tout entiers les rayons calorifiques sans les empêcher ou les aider ; il pensait au contraire que tous les gaz en absorbent toujours quelques-uns et s’échauffent à leurs dépens. Mais à l’époque où il écrivait, aucune expérience n’était encore venue pour lui donner raison ou tort, et celles que Dulong et Petit exécutèrent ensuite n’étaient pas de nature à résoudre la question, car leur ballon n’était pas grand, et, dans le trajet de l’enceinte au thermomètre, les rayons franchissaient une épaisseur d’air bien trop petite pour qu’elle pût en absorber une proportion sensible. D’où il suit que, malgré leur exactitude reconnue, ces expériences ne prouvent rien pour l’atmosphère entière.

C’est Pouillet qui le premier a mis hors de doute le pouvoir absorbant de l’atmosphère. Quand ils arrivent aux limites supérieures de l’air, les rayons solaires ont gardé toute leur force, que n’a diminuée en rien leur trajet à travers les quarante millions de lieues qu’ils ont parcourues ; ils n’y ont rencontré en effet aucune sorte de matière pondérable qui ait pu les affaiblir. Cette force est à peine diminuée quand ils rencontrent les hautes montagnes du globe. Là ils élèvent considérablement la température d’un thermomètre dont la boule est noircie, mais l’air est très froid à l’ombre. Exposés au soleil, les observateurs éprouvent les mêmes sensations que devant un grand feu allumé l’hiver au milieu de la campagne ; brûlés par devant, ils gèlent par, derrière. A mesure que les rayons s’enfoncent dans la profondeur des vallées, ils se dépouillent avec une étonnante rapidité de leur chaleur obscure pour la céder à l’air et pour l’échauffer. Le reste arrive à la terre, qui tout d’abord le transforme et qui, après, le renvoie vers l’air, qu’il traverse une seconde fois en sens opposé, où il subit une absorption nouvelle et encore plus grande que la première. Ainsi l’air n’est point, comme nous l’avions admis, une masse inerte assistant au passage de la chaleur sans l’empêcher ; c’est au contraire un corps qui l’arrête partiellement au passage, soit quand elle vient du