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et terminées au burin, des armes et des outils du même métal, des terres cuites du caractère le plus primitif[1]. Les tombes plus récentes ne contenaient plus de vases d’argile, mais des vases de verre en forme d’amphore, de lekythe, d’assiette, de tasse, des anneaux, des bracelets, des amulettes, des perles de la même matière. L’industrie moderne, dans ces derniers temps, a réussi, par des procédés chimiques, à imiter la splendide irisation, produit du temps et de son action lente, qui faisait surtout la beauté de ces objets au moment où ils sortirent des caveaux qui les avaient conservés intacts pendant plus de deux mille ans. On a pu voir au Champ de Mars, exposées sous le titre de Cristaux de Chypre, des copies plus ou moins exactes des plus élégans de ces vases, qui doivent nous représenter l’industrie des verriers phéniciens vers le commencement de notre ère et pendant les siècles suivans. Au bout de trois ans, M. de Cesnola avait ouvert et exploré, à Dali et dans les environs, près de dix mille tombes dont les plus anciennes remontaient au temps des premiers colons phéniciens, tandis que d’autres pouvaient être attribuées aux derniers jours de l’empire romain.

M. de Cesnola fut encore mieux servi par la chance près d’Athiénau, sur l’emplacement de l’ancienne ville de Golgos. Cette chance, il sut la mettre à profit par l’énergie qu’il déploya pour assurer, au milieu de nombreuses difficultés, l’achèvement des fouilles. Les résultats de ces recherches, commencées dès 1867, furent très variés. Nous ne dirons rien de stèles funéraires, du dessin le plus étrange, dont quelques échantillons avaient été apportés au Louvre par M. de Vogüé, ni d’un sarcophage en pierre calcaire dont les quatre faces sont ornées de bas-reliefs dont l’un représente la mort de Méduse et la naissance de Chrysaor et de Pégase ; ce qui fit événement dans l’île et en Europe, ce fut, au printemps de 1870, la découverte de statues en assez grand nombre pour remplira elles seules plusieurs salles de musée. Le premier groupe se composait de trente-deux figures ; il fut trouvé dans un champ où quelques-uns de ceux qui assistèrent aux fouilles, M. Lang entre autres, ont voulu reconnaître un temple, assertion que ne confirme point M. de Cesnola. Celui-ci avait pourtant relevé vingt-six piédestaux encore en place ; à plusieurs d’entre eux adhéraient les pieds des statues

  1. Cyprus, chapitres II et III. On trouvera une très fidèle représentation de la patère d’Idalie dans la Revue archéologique, t. XXIV, p. 305 et suivantes, dans un article de M. George Colonna-Ceccaldi. Par les nombreuses communications qu’il a adressées à ce recueil, ce jeune savant, frère de l’ancien consul de France à Larnaca, lui-même alors attaché au consulat de Beyrouth, a beaucoup contribué à faire connaîtra les antiquités cypriotes ; il a décrit et expliqué beaucoup de monumens au moment où ils venaient d’être découverts.