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Page:Revue des Deux Mondes - 1879 - tome 31.djvu/598

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communs. Nous aurons à rendre compte de ces ressemblances en essayant de définir, dans une dernière étude, l’art cypriote, le rôle qu’il a joué et la place que l’histoire doit lui réserver. Il nous suffit pour aujourd’hui de signaler le fait. Quant aux dimensions des figures, elles varient de l’une à l’autre. Le premier monument découvert était un colosse ou plutôt un fragment de colosse ; la tête seule fut retrouvée. Elle avait près de 1 mètre de haut (0,84), ce qui permet de conclure à une statue d’environ 7 mètres. Une autre figure, que l’on a pu reconstituer tout entière, mesure près de 3 mètres : elle parait représenter un prêtre tenant de la main droite une coupe, de la gauche une colombe. La statue était brisée en trois morceaux ; la tête et les pieds étaient séparés du corps. L’un des deux attributs, une colombe, fixé au poing par des chevilles de bois, fut retrouvé peu après. Les bras avaient été travaillés séparément et ajustés à l’aide de grosses chevilles de bois. On a de même réussi à recomposer, sauf le bras droit, une figure d’Hercule, plus grande encore de quelques centimètres ; l’exécution en est moins bonne que celle de la statue du prêtre ; mais ce qui ajoute à l’intérêt du monument, c’est un bas-relief sculpté sur une des faces du piédestal et qui laissait voir encore, au moment de la découverte, des traces de couleur rouge ; l’artiste y avait représenté, non sans un juste sentiment du mouvement et de la vie, un des travaux d’Hercule, le héros perçant de sa flèche le chien Orthros, pendant que le troupeau de Géryon s’enfuit tumultueusement et tente d’échapper aux mains puissantes du fils d’Alcmène. Un certain nombre de figures étaient de grandeur naturelle ; enfin près de deux cents statuettes n’atteignaient pas 1 mètre de hauteur.

Les figures d’homme étaient les plus nombreuses ; mais il y avait aussi beaucoup de statues de femme. La diversité n’était pas moindre pour ce qui regardait le style. Certains de ces morceaux ont une apparence tout égyptienne ; d’autres font songer surtout à l’Assyrie ; enfin l’influence grecque est très sensible dans les statues découvertes en dernier lieu, près du mur occidental. Les figures de style semblable se sont retrouvées, en général, près les unes des autres. Chaque siècle paraît avoir rempli de ses offrandes et peuplé de ses images une partie du sanctuaire, jusqu’au moment où toutes les places auraient été prises. Dès lors, les gardiens du temple n’avaient plus qu’à veiller sur tous ces monumens du passé religieux de l’île et à les montrer aux milliers de pèlerins qu’attiraient à Cypre la célébrité de ses sanctuaires, les singularités de son culte, l’éclat de ses cérémonies, la beauté de ses courtisanes. Il y avait là une belle matière aux récits des exégètes, ces sacristains de l’antiquité. Quel malheur qu’un Pausanias n’ait point passé