publics. C’était une assemblée de famille, de la famille française tout entière, appelée à surveiller les premiers pas dans la vie de ses propres enfans. » Nous sommes loin, hélas ! de cette largeur d’idées ; un déplorable esprit d’antagonisme s’est introduit, depuis le vote de la loi du 12 juillet 1875, dans les rapports de l’église et de l’Université, et l’on peut déjà prévoir le jour où l’état, par représailles, voudra retirer au clergé, devenu son concurrent, la part d’influence et de direction qu’il lui avait concédée jusqu’à ce jour. L’éviction des membres de l’épiscopat qui siègent dans nos conseils universitaires n’est plus une question d’années, c’est une question de mois[1]. En ce moment même une grande commission parlementaire élabore un projet de loi qui prononcera ce divorce ; la rupture est fatale. Dans ces conditions, l’institution d’un nouveau conseil auquel seraient dévolues toutes les attributions du conseil supérieur et des conseils académiques en matière d’enseignement supérieur s’imposera tôt ou tard aux pouvoirs publics. Le corps enseignant et l’état y sont également intéressés ; l’un y trouverait une garantie contre le morcellement de pouvoir et les empiétemens qui seraient à craindre avec la nouvelle organisation de nos facultés ; l’autre serait assuré d’y rencontrer une protection efficace pour ses titres et pour ses droits.
Telle serait, à notre avis, la solution qui froisserait le moins d’intérêts particuliers et qui offrirait en même temps le plus d’avantages. A vrai dire on ne se flatte pas qu’elle satisferait tout le monde ; plusieurs villes y perdraient, dans un avenir plus ou moins rapproché, la gloire de lancer chaque année quelques bacheliers dans la circulation ; quelques vieux professeurs de facultés, établis dans le pays et entourés de considération, se résigneraient difficilement à quitter le théâtre de leurs exploits discrets. Mais, à part ces petits inconvéniens, l’Université prise en masse s’applaudirait, croyons-nous, d’une réforme qui ajouterait à ses moyens d’action sans compromettre son unité.
Toutefois on aurait tort d’attribuer à cette réforme je ne sais quelle vertu de rajeunissement et de reconstitution. Il en est des lois comme de certains remèdes ; elle peuvent corriger un vice d’organisation, elles sont impuissantes dans les maladies de langueur par où périssent les corps aussi bien que les individus. Or, il faut avoir le courage de le dire, c’est de langueur et de
- ↑ Nous avions prévu dès 1870 cette conséquence de la liberté de l’enseignement supérieur. Voyez, dans la Revue du 1er février 1870, la Liberté de l’enseignement supérieur en France. Les nouveaux projets de M. Jules Ferry suppriment complètement la représentation de la magistrature et du clergé dans le conseil supérieur de l’instruction publique et dans les conseils académiques.