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Page:Revue des Deux Mondes - 1879 - tome 32.djvu/667

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d’accostage sûr et commode, confortable en un mot, à l’entrée de la Gironde, favoriserait admirablement les progrès de ce transit de voyageurs anglais, belges et allemands ; ils sont sollicités par le double désir de passer par Paris et d’abréger leur traversée. Il suffirait de frais peu considérables pour attirer en France ce mouvement de voyageurs, qui serait une bonne fortune pour nos chemins de fer.

Les navires légers peuvent louvoyer d’un bord à l’autre dans le fleuve, surtout au moment de la pleine mer ; mais les grands bâtimens se tiennent dans les eaux profondes, qui constituent le chenal de navigation. En venant de la mer, ce chenal est voisin de la côte de Saintonge jusqu’à Royan ; de là, il passe près de la rive du Médoc qu’il quitte vers Blaye pour prendre le milieu du fleuve, et pénétrer dans la Garonne en longeant le Bec-d’Ambès. Les îles qui sont dans ces parages divisent les courans en plusieurs branches dont l’une a une tendance très marquée à se frayer un passage sur le bord du Médoc. Il y avait donc autrefois un chenal de part et d’autre de ces îles ; mais l’on a barré celui de la rive gauche par des endiguemens, dans l’espoir d’améliorer le chenal du milieu en y concentrant le courant. Ces travaux, du reste peu coûteux et faciles à détruire, n’ont point amené le résultat voulu. Les eaux ont continué d’affluer vers la rive du Médoc, qui dessine en ce point une courbe concave toujours recherchée par les grands courans.

Les limites du chenal sont jalonnées par des bouées servant à la navigation de jour, tandis que durant la nuit la marche des navires est guidée par des feux flottans et des phares construits, soit sur la côte, soit sur les îles. À ce point de vue, le commerce maritime n’a rien à réclamer pour l’amélioration des accès de Bordeaux ; et vraiment nulle part ailleurs, même dans l’Escaut ou la Tamise, on ne saurait trouver un balisage plus complet.

La profondeur du chenal subit de fréquentes modifications, par les déplacemens que les courans opèrent dans la masse énorme de sables et de vases obstruant le lit du fleuve. Une partie de ces matériaux est apportée par les rivières du bassin de la Gironde, l’autre provient de l’érosion des dunes du littoral. Le bord de ces dunes s’effondre graduellement, sous le choc continuel de la longue houle de l’Océan qui vient déferler au rivage sans que nul obstacle l’arrête depuis les rives mêmes de l’Amérique. Pris et repris par les lames qui frappent obliquement la côte, sous l’impulsion des vents régnans du sud-ouest, les sables cheminent lentement jusqu’à l’embouchure de la Gironde où le flot les saisit et les roule dans le fleuve. Pourtant un premier obstacle les arrête ; c’est le plateau de roches sur lequel repose la tour du Cordouan. Le