jambes également entre le genoux et le bord des chaussettes. La chaussure particulière à Biskra s’appelle bel’ra. C’est une sorte de pantoufle moyen âge en peau jaune avec une patte sur le cou-de-pied. On a vu dans tous les tableaux représentant des Arabes le costume des cavaliers avec leurs bottes rouges en forme de bas qui protège la jambe, pliée par les étriers courts, contre les broderies de la selle et des harnais.
Après le repas du kaïd, nous nous rendîmes tous, précédés de serviteurs portant des lanternes, chez le commandant supérieur, qui devait prolonger la soirée en donnant une fête où figureraient les célèbres danseuses de la tribu des Ouled-Nayls. On arrive au palais du commandement en suivant des avenues plantées par les Français. Ce soir-là le public avait la permission de s’y promener. Près de la porte jouait la musique militaire. Le palais, bâtiment long surmonté d’un belvédère, se détachait en blanc sur les arbres ; toutes les fenêtres étaient ouvertes et laissaient voir au rez-de-chaussée des salons brillamment éclairés. Nous pénétrâmes d’abord dans une première pièce où des plateaux chargés de tasses étaient posés à terre sur des tapis pour les Arabes et les spahis. Puis nous entrâmes dans le salon principal où des fauteuils rangés au fond nous étaient destinés. Le kaïd, les officiers et les autres autorités de l’endroit s’assirent à côté de nous. Une colonne massive, servant sans doute à soutenir le plafond, s’élevait au milieu de la chambre. Elle était garnie de palmes, de fleurs et de candélabres. D’épais tapis couvraient le sol. A travers les ouvertures, on apercevait un jardin illuminé, et le long du mur, en face de nous, une vingtaine d’Ouled-Nayls étaient rangées, attendant le signal de la danse. Dans un angle, on avait placé les musiciens de la tribu ; debout aux portes, une foule bigarrée, composée de militaires, d’Arabes et de nègres, regardait la fête. Je fus d’abord frappée de l’aspect étrange de ces femmes, assises côte à côte vis-à-vis de nous. Aucune des femmes nomades que j’avais rencontrées jusqu’alors ne m’avait donné l’idée de costumes aussi singuliers et de physionomies aussi frappantes. Elles avaient le type régulier, les pommettes larges, les traits accentués et droits, et la peau des mulâtresses, les mains petites et les attaches des poignets remarquablement délicates. Des deux côtés du visage, elles portaient des nattes de cheveux couleur de jais, bourrées de laine. Depuis la racine jusqu’au bas des joues, ces tresses pouvaient avoir une largeur de 10 centimètres au moins. On juge de la circonférence de la tête garnie de ces masses épaisses. Un grand haik, comme un châle, soit en laine noire brodée de couleur, soit en laine blanche, était posé sur la tête, où il était maintenu au moyen d’un turban lamé d’or,