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de portions de cylindre qui se coupent à angle droit. La disposition du double escalier qui serpente sur ce socle avant de pénétrer dans l’intérieur est étrange, mais, au moyen d’une épure, on se rend compte qu’il a pu exister. Selon M. Chipiez, ces deux exemples représenteraient le style assyrien proprement dit. Le troisième type appartiendrait à la Chaldée. Lord Loftus et J. Taylor en ont constaté les données dans les très antiques ruines de Wartha et de Hour, la ville d’Abraham. Ici le plan n’est plus carré, mais barlong ; l’escalier est extérieur et cette fois la tour est un temple. Enfin le quatrième type serait purement babylonien, puisque les derniers vestiges de la tour de Babel ont servi de base à sa reconstitution. M. Chipiez, dans cette partie de son travail, a suivi l’opinion de M. Oppert, qui a étudié la question sur place. Après le savant, l’artiste adopte l’idée des rampes qui à droite et à gauche flanquaient l’édifice. Celui-ci s’élevait sur un plan carré et avait huit étages. C’est d’après des inscriptions publiées récemment qu’a été composé le dôme, qu’ont été placés les autels que l’on aperçoit sur le couronnement. Une pareille œuvre demanderait une monographie, mais tel qu’on la voit, elle est du plus grand intérêt. L’aspect de ces tours aux formes insolites est imposant, leur revêtement de briques coloriées splendide. Ajoutons que les dessins de M. Chipiez sont exécutés en perfection et méritent de trouver place dans un musée d’architecture qu’il serait désirable de voir créer.

Il faut s’applaudir de voir le goût de pareilles études s’étendre à des sujets variés, et M. Vaurabourg a eu une idée heureuse en appliquant son talent à nous donner une notion plus précise de l’art du Moghreb. L’attention était depuis longtemps portée sur les édifices d’architecture arabe que nos colons de l’Afrique française nomment moresque. A tout prendre, le travail qui nous est présenté ne nous fournit que peu de données nouvelles sur le plan des maisons algériennes ; mais ces gracieuses constructions, rapprochées de monumens tel que la Zaouia de Sidi-Ab-der-Raman et tel que la mosquée de Djama-el-Djedid, forment un ensemble du plus agréable éclat. Ce n’est pas à dire qu’il s’agisse ici d’un art ayant à proprement parler sa théorie : cet art a ses formes générales d’un caractère élégant et surtout un vif sentiment de la décoration. À ce point de vue les dessins de M. Vaurabourg sont charmans et rendent fidèlement l’impression que l’on rapporte d’un voyage en Algérie. La nature et la fraîcheur des divers matériaux employés dans la construction et l’harmonie des colorations murales sont rendues avec grâce ; il y a dans ce travail un sentiment distingué de la couleur qui, dans ce cas particulier, était une qualité que l’on devait exiger de l’architecte.