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les jésuites, que n’a-t-on pas vomi contre eux, sans compter ceux que l’on a tués, dont le plus grand de tous, Olivaint ? Le lecteur se rappelle-t-il que parmi les membres du comité central il y avait un certain Grêlier, — plus bête que méchant, m’a-t-on dit, — qui, le 20 mai, publia une note dans le Journal officiel de la commune pour prévenir « les réactionnaires » qu’on allait brûler leurs titres de rentes. Celui-là aussi était l’ennemi des prêtres. La soutane lui faisait hausser les épaules, et la doctrine de Loyola, — dont il ne savait pas le premier mot, — le mettait en fureur. Quand il fallut fuir, Grêlier alla frapper à la porte des jésuites encore consternés de la mort des leurs ; il déclina ses noms et qualités. On ne vit pas en lui la brebis galeuse, on ne reconnut que la brebis malade ; on pensa au Bon Pasteur, et l’on ouvrit. Dans le jardin de la maison des Moulineaux, Grêlier promenait mélancoliquement sa forte encolure et son triple menton. Il trouvait l’ordinaire un peu maigre, et se souvenant qu’avant de devenir législateur au comité central, délégué au ministère de l’intérieur, membre d’une commission au ministère de la guerre, il avait été cuisinier chez le maréchal de Saint-Arnaud et chez le duc de Noailles, il fricassait lui-même quelques ragoûts dont les pères appréciaient la finesse. Retomber de l’Hôtel de Ville aux fourneaux, c’est pénible, mais Grêlier put se consoler en apprenant que Dioclétien, qui, il est vrai, ne fut qu’empereur, cultiva ses légumes à Salone après son abdication. Si, lorsque l’on jetait les prêtres de la société de Jésus dans les cabanons de Mazas, un seul d’entre eux était venu dire à Grêlier : Sauvez -moi ! que serait-il advenu ?

Les calomnies que la commune avait répandues sur tous les ordres religieux, calomnies que l’on imposait à la population fédérée comme un article de foi, n’empêchèrent pas, on vient de le voir, des communards fugitifs de se réfugier chez ceux-là même qu’ils chargeaient de tous les crimes. Ce qui prouve que certains d’entre eux ne croyaient guère ce qu’ils disaient ; mais d’autres y crurent, et souvent des commandans en chef furent paralysés dans leurs bonnes intentions par les préjugés obtus et enracinés des inférieurs auxquels ils avaient transmis leurs ordres. Le 14 mai, Dombrowski, « général de la première armée, » expédie ses instructions au lieutenant-colonel Barillier, son grand prévôt, et au colonel Mathieu, « commandant supérieur des forces entre le Point-du-Jour et la porte Maillot. » Le grand prévôt mettra les scellés sur le « couvant » de l’Assomption à Auteuil, le colonel Mathieu laissera sortir librement, en emportant leurs effets, « les dames du dit couvant ; ces dames ont droit aux plus grands égards. » Le grand prévôt Barillier remplit sa mission avec beaucoup de