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mouvement brownien, était ici une preuve irrécusable de la présence de l’eau dans la roche. A l’époque où Sorby fit sa découverte, la question de l’origine du granit était l’objet d’un débat animé entre les géologues ; les uns considéraient cette roche comme ayant été formée par voie de fusion à la manière des laves, les autres regardaient l’eau comme ayant joué un rôle prépondérant dans sa formation. On comprend dès lors de quel poids dut être dans la balance la constatation des inclusions aqueuses.

Le travail de Sorby avait eu pour effet de démontrer par un exemple frappant combien il est aisé de mettre en pratique le procédé de Nicol pour la taille des minéraux durs et quel parti l’on en pouvait tirer pour la solution d’importantes questions géologiques. Cependant beaucoup de préjugés subsistaient encore contre ce mode d’examen. Lorsque des cristaux microscopiques sont enchevêtrés et intimement soudés les uns aux autres, comme ils le sont généralement dans les roches, une coupe mince les atteint dans une direction quelconque ; des cristaux de même forme, appartenant à la même espèce minérale, se trouvent tranchés dans les orientations les plus diverses, et, par conséquent, offrent des sections de forme variée. Si plusieurs minéraux visibles dans une préparation affectent la même couleur, comment les distinguer ? Le système cristallin d’un minéral en gros cristaux isolés est déterminé par des mesures d’angles solides ; où trouver dans une section plane des données qui puissent remplacer celles-ci ?

Ces objections étaient des plus graves. Quant à l’examen des propriétés optiques des minéraux réduits en lames minces, on le croyait impraticable. Les méthodes jusqu’alors usitées en minéralogie, méthodes naguère si fructueuses entre les mains de Biot, de Sénarmont, de Des Cloizeaux, semblaient ici sans application ; leur mise en œuvre paraissait exiger une épaisseur des lamelles cristallines notablement supérieure à celle des lames minces taillées suivant le procédé de Nicol, et surtout l’usage de sections faites dans des orientations connues. En un mot, on pensait qu’il était impossible de déterminer les propriétés optiques d’un cristal, lorsqu’il n’était pas maniable, et, dans le cas contraire, il est évident que la taille en lames minces devenait une opération fastidieuse et superflue et qu’il n’y avait plus lieu de recourir à l’emploi du microscope.

On comprend que ces difficultés aient longtemps rebuté les minéralogistes ; cependant elles n’étaient pas insurmontables. La variabilité dans la forme des sections que présentent les échantillons d’un même minéral au sein d’une lamelle mince n’empêche aucunement de reconnaître la forme fondamentale du solide auquel elles appartiennent ; la multiplicité des sections fait ressortir