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Page:Revue des Deux Mondes - 1879 - tome 34.djvu/565

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singulier mépris des hommes pour qu’ils osent mentir avec une telle impudence et s’imaginer que leurs fables seront acceptées par ta crédulité des foules. Dans une livraison du Bulletin de la commune, publié en Belgique sous un format commode qui permet l’expédition par la poste, je lis une note vraiment extraordinaire. Ce bulletin paraît, — ou paraissait, — sous la direction de G. Cluseret, F. Gambon, membres de la commune de Paris, et de Fesneau, président de la ligue du midi. Dans le n° 1, adressé au peuple français et imprimé à Liège, 1874, l’auteur d’un article intitulé : Légitimité du mouvement communal, raconte que tous les crimes commis à Paris, du 22 au 28 mai, sont exclusivement imputables à l’armée française, et que ces crimes « portèrent au comble la fureur populaire. » Faisant allusion aux massacres des otages, l’auteur se demande : « La réaction de Versailles est-elle étrangère à ces exécutions ? » Et il se répond par la note que voici : « Le général Cluseret, étant à la guerre, reçut plusieurs avis venant de la droite de l’assemblée, le prévenant qu’il entrait dans les plans de M. Thiers de faire assassiner les otages, et spécialement M. Darboy. Il en conféra avec Rigault, et choisit en conséquence la garde de Mazas[1]. » Dans la même livraison, on revendique orgueilleusement toute responsabilité dans le renversement de la colonne de la grande armée et dans l’incendie des Tuileries. Quant aux autres incendies, ils sont l’œuvre, ils ne peuvent être que l’œuvre de « la réaction. » La commune fut clémente, elle fut douce et maternelle : a Pas une goutte de sang n’a été versée par le peuple. » (Page 31.) C’est leur marotte ; ils sont l’agneau sans tache, la blanche colombe ; Candide, entrant inopinément à Paris en avril ou en mai 1871, se serait cru revenu au pays d’Eldorado. Dans la Commune, almanach socialiste pour 1877, imprimé à Genève, Arthur Arnould écrit sérieusement ceci à la page 30 : « Jamais Paris ne jouit d’une tranquillité plus absolue, ne fut aussi sûr au point de vue matériel que pendant la commune. Il n’y avait plus ni police, ni magistrature. Pas de gendarmes, pas de juges ! Il n’y eut pas un seul délit. » Le plus étrange, c’est qu’Arthur Arnould est de bonne foi.

Dans certaines circonstances solennelles, ils se réunissent, discutent, rédigent une proclamation collective et la publient sous la signature de l’un d’eux. Au moment des élections de novembre 1877, le menuisier Pindy, gouverneur militaire de l’Hôtel de Ville, qu’il abandonna le dernier, agissant au nom de « la fédération française de l’association internationale des travailleurs, » signe un manifeste où l’on peut lire : « Vous devez vous préparer à passer

  1. Bulletin de la commune (livraison de 32 pages), p. 29.