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être annexée au procès-verbal de l’assemblée de Mantes, de façon que l’acte d’infirmation ne fût point séparé de l’acte qu’on venait de condamner. Tout ce qui avait été fait dans la réunion de Mantes, à partir du 15 mai, fut déclaré nul, hormis le vote des sommes accordées au roi en vertu d’un contrat sur lequel la compagnie n’entendait pas revenir.

Cette première démonstration dirigée contre une décision du feu roi froissa Anne d’Autriche, qui y vit un blâme solennel infligé à son époux, et, quoiqu’il s’agît en réalité d’une mesure émanée de Richelieu, dont elle avait eu fort à souffrir, elle se tint pour offensée. C’est ce que rapporte le cardinal de Retz, l’un des instigateurs des résolutions que prit l’assemblée dès le début de sa session. « Il arriva par hasard, écrit-il dans ses Mémoires, que lorsque l’on y délibéra, le tour, qui tomba ce jour-là sur la province de Paris, m’obligea à parler le premier. J’ouvris donc l’adsis selon que nous l’avions tous concerté, et il fut suivi de toutes les voix. À mon retour chez moi, je trouvai l’argentier de la reine qui me portait l’ordre de l’aller trouver à l’heure mesme ; elle estoit sur son lit, dans sa petite chambre grise, et elle me dit avec un ton de voix fort aigre, qui lui estoit naturel, qu’elle n’eust jamais creu que j’eus esté capable de lui manquer au point que je venais de le faire dans une occasion qui blessoit la mémoire du feu roi son seigneur. » Retz donna ses raisons, et Anne d’Autriche lui dit d’aller les exposer à Mazarin, qui ne les goûta pas plus qu’elle. « Il me parla, poursuit le coadjuteur, de l’air du monde le plus haut ; il ne voulut point escouter mes justifications, et il me déclara qu’il me commandoit de la part du roi que je me rétractasse le lendemain en pleine assemblée. » Retz ne voulut rien promettre, et il chercha vainement à ramener le ministre à d’autres sentimens ; voyant qu’il n’y réussissait pas, il prit le parti d’aller trouver l’archevêque d’Arles, esprit sage et modéré, et il le pria de se joindre à lui pour faire entendre raison à Mazarin. La démarche n’eut pas plus de succès, et les deux prélats sortirent de chez le ministre convaincus qu’il était l’homme du monde le moins entendu dans les affaires du clergé.

Le mauvais accueil qu’avait fait le gouvernement à la démonstration contre les actes de Richelieu ne détourna pas les députés de leur intention de revenir sur tout ce que le clergé avait voté sous la pression de ce ministre, et ils nommèrent une commission pour réviser les dernières décisions adoptées à Mantes, rechercher ce qui avait été fait de contraire à la dignité et aux intérêts du clergé et y remédier au plus vite, afin que de pareilles atteintes ne pussent plus se renouveler. Cette commission devait faire un rapport fournissant la matière d’une circulaire à adresser à toutes les provinces et indiquant les mesures à adopter. L’humeur que la reine avait té