Page:Revue des Deux Mondes - 1879 - tome 35.djvu/282

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l’affaire, car il comprenait que le gouvernement royal, tout ennemie qu’eût été Anne d’Autriche de Richelieu, demeurait solidaire de ce qu’avait fait le grand cardinal, et que l’on porterait quelque atteinte au prestige de la couronne si l’on condamnait les actes auxquels elle avait donné sa sanction. Lors donc qu’il fallut passer des paroles à la pratique, il changea tout à coup d’attitude et il fit presser par la reine le coadjuteur pour que l’on prît un biais qui, écrit celui-ci, m’aurait infailliblement déshonoré. Le jeune et ambitieux prélat n’entra donc pas dans les vues de Mazarin ; il essaya de le dissuader ; il n’y parvint pas. La patience finit par lui manquer ; il rappela au ministre sa promesse et, n’en ayant rien tiré, il se décida à écrire à toutes les provinces. Comme il venait de composer sa circulaire et l’allait fermer, le duc d’Orléans entra chez lui, lut la lettre et la lui arracha des mains, en disant qu’il voulait finir cette araire. Le prince, en effet, se rendit immédiatement chez Mazarin, et, plus heureux que le coadjuteur, il obtint l’expédition des lettres à Rome que celui-ci avait vainement réclamées. Le pape accorda le bref nécessaire pour qu’on pût procéder à la révision du procès de l’évêque de Léon, et ce bref arriva avant que l’assemblée se fût séparée. Elle nomma pour l’examiner des commissaires, au nombre desquels étaient l’évêque de Chartres et le coadjuteur. Après en avoir pris connaissance, ils représentèrent à la compagnie que la lettre pontificale contenait des clauses de nature à porter préjudice aux usages, droits et libertés de V église gallicane. Les députés s’en émurent, et ils rédigèrent une protestation qui déclarait que le bref ne saurait infirmer ces usages, droits et libertés. Cette réserve n’empêcha pas les effets du bref. La commission désignée par le pape se réunit et elle rendit un jugement qui réintégrait de Rieux dans son siège épiscopal. Cupif fut transféré à l’évêché de Dol. Mais celui-ci refusa longtemps d’obéir à la décision de la commission papale. Une lutte des plus vives s’engagea entre les deux compétiteurs, qui fulminèrent l’un contre l’autre et contre leurs adversaires respectifs des anathèmes. Le conseil d’état, mécontent de l’appel fait au saint-siège, soutenait Cupif, homme violent et emporté qui se répandait en injures contre la commission et se laissa même aller à des voies de fait sur des prêtres opposés à ses prétentions. Le conflit se prolongea jusqu’à la fin de l’année 1650, et Cupif ne consentit à désavouer sa conduite qu’après avoir été mandé devant l’assemblée du clergé qui se tint cette année-là.

L’affaire de l’évêque de Léon ayant été remise à la diligence du coadjuteur, l’assemblée s’occupa de la demande du subside. Comme satisfaction lui avait été donnée par le gouvernement sur des plaintes qu’elle lui avait adressées et qui concernaient certaines im