Page:Revue des Deux Mondes - 1879 - tome 35.djvu/288

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tant de grâces et si importantes que le roi a accordées au clergé, vous contribuiez de votre côté et fassiez effort pour lui donner contentement. » L’assemblée ne se laissa pourtant pas prendre à ces exhortations ; elle décida qu’elle expédierait préalablement les affaires qu’il lui restait à régler et verrait au moment de se séparer en quoi elle pourrait répondre aux demandes qui lui étaient faites. Ce moyen dilatoire n’était pas du goût du gouvernement, impatient d’avoir de l’argent, et quelques jours après, le 2 décembre, on apportait une seconde lettre du roi, d’un ton assez aigre. Il s’y plaignait à la compagnie des diverses fuites dont elle avait usé dans ses réponses. La lettre mettait l’assemblée en demeure de dire incontinent ce qu’elle entendait faire. Louis XIV, ou plutôt la régente qui le faisait parler, déclarait au nom du bien commun de l’état, qu’il fallait que dès le lendemain les députés en délibérassent. D’Aligre, porteur de la lettre, représenta avec amertume qu’il y avait quatre mois qu’on ajournait la réponse, et pour contraindre l’assemblée à en finir, il lui signifia qu’il ne quitterait pas le couvent des GrandsAugustins où se tenaient les séances, tant qu’on ne lui aurait pas remis la décision. Le président, l’archevêque de Reims, Léonor d’Estampes, qui, à l’encontre de son collègue l’archevêque d’Embrun, ménageait fort le pouvoir, excusa la compagnie de ses délais, en alléguant les obligations particulières où elle s’était trouvée. D’Aligre sortit de la salle, et l’assemblée, ainsi mise en demeure, inscrivit à son ordre du jour du 5 décembre la délibération sur la demande du roi. La discussif)n générale à laquelle cette demande donna lieu se passa en échange de paroles assez vives ; elle se prolongea, et ce ne fut que le 7 qu’on procéda au vote. Un peu moins des deux tiers des voix se prononcèrent pour un don gratuit, mais les opposans objectèrent que le règlement qui avait été adopté à l’assemblée de 16/i6 exigeait, quand il s’agissait de subsides extraordinaires, la majorité des deux tiers. Le subside devait donc être refusé. L’assemblée le reconnut, et elle décida que le roi sejviit très humblement supplié de ne trouver pas mauvais si l’assemblée ne lui accordait aucun don ou secours. On juge du désappointement du gouvernement ! Il semblait qu’il n’y eût plus rien à faire, et que la d(^faite de la couronne fût consommée. En effet, l’assemblée se regardait comme délivrée des importunités de Mazarin, et elle demanda pour le mois de janvier audience à la reine, afin de lui présenter les remontrances que ses délégués n’avaient pu lui adresser à Saintes. Mais Anne d’Autriche, durant ce conflit, avait changé d’altitude envers les adversaires de son ministre ; elle songeait déjà à la mise en liberté des princes, vivement sollicitée qu’elle était par la noblesse et une partie du parlement, quoique Mazarin, qui voulait en avoir le mérite, y fît encore de l’opposition. Elle ne jugea pas