Page:Revue des Deux Mondes - 1879 - tome 35.djvu/287

La bibliothèque libre.
Aller à la navigation Aller à la recherche
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

sollicitée par la princesse douairière de Condé, mère de Conti, avait jugé qu’elle devait intervenir pour sa mise en liberté. Anne d’Autriche fut avertie par les membres de son conseil restés à Paris de la démarche que le clergé comptait faire, et quand les délégués ayant à leur tête l’un des présidens de l’assemblée, George d’Aubusson, archevêque d’Embrun, furent arrivés en Saintonge, il leur fut répondu que la régente ne pourrait leur donner audience s’ils venaient lui demander la mise en liberté du prince, une telle démarche outre-passant les droits de la compagnie, attendu que le roi avait pleine autorité sur les membres de sa famille. Mazarin entendait que le discours contenant les remontrances fût communiqué préalablement à la reine, afin d’être bien sûr qu’il ne renfermait rien de relatif à la détention de Conti. Les délégués se refusèrent à ce qu’on exigeait d’eux ; ils objectaient que la chose était contraire à tous les précédens. Ils soutenaient d’ailleurs qu’en sollicitant la mise en liberté du prince, ils usaient du privilège qu’avait toujours eu l’église de faire appel à la clémence royale, surtout quand il s’agissait d’un membre du clergé. Enfin ils ajoutaient qu’en l’absence de pouvoirs à eux donnés pour modifier les termes des doléances, ils ne consentiraient pas à supprimer du discours le paragraphe concernant Conti. On ne parvint pas à s’entendre, et la députation s’en revint à Paris, s’étant bornée à entretenir Mazarin des divers sujets de plaintes que le clergé avait à adresser à la couronne. Elle rendit compte de sa mission à l’assemblée, et celle-ci consigna au procès-verbal la relation que lui firent ses mandataires. On était à la fin d’octobre et la compagnie n’ayant rien obtenu, elle ne voulait accorder aucun subside extraordinaire. Malgré les nouvelles instances que firent les commissaires du roi, elle se disposait à clore la session. Cela inquiétait le gouvernement, qui jugea qu’avant de la laisser se séparer il devait tenter un dernier et vigoureux effort, et le 27 novembre, comme l’assemblée était en séance, elle reçut la visite des trois commissaires précédemment nommés. D’Aligre apportait une lettre du roi, qui demandait itérativement au clergé son concours pécuniaire. Pour l’amener à de plus favorables dispositions, sa majesté accordait satisfaction à plusieurs des demandes dont les délégués avaient parlé en Saintonge à Mazarin. Les termes de la lettre étaient plus persuasifs qu’impérieux, et le langage de d’Aligre ne démentit pas cette modération affectée ; il protesta contre toute pensée de violenter la compagnie et lui représenta simplement le devoir d’honneur qu’elle avait de venir au secours du roi dans une si grande nécessité. Il confessait que l’assemblée avait le droit de traiter avec la couronne sur le pied de l’égalité. « Nos contrats, disait le commissaire royal, sont synallagmatiques ; nous ne traitons point sous des conditions léonines ; il est juste qu’après