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qui allait occuper une grande place dans la rénovation intellectuelle, et transformer ou plutôt créer l’étude attentive et respectueuse des anciens monumens.

Le XIVe siècle a été dans le centre de l’Italie un temps de continuelle anarchie politique et civile. C’est pourtant dès le début de cette période que se montre dans Rome un sérieux progrès des arts auxiliaires de l’architecture. Giotto y est venu de 1298 à 1300. Sa célèbre mosaïque de la Navicella, après avoir orné l’atrium de l’ancienne basilique de Saint-Pierre, est tellement transformée aujourd’hui par les restaurations successives qu’on n’y peut apprécier de l’artiste que le dessin général; mais on peut admirer dans l’archive capitulaire ses belles miniatures du manuscrit de la Vie de saint George, et dans la sacristie, à côté de quelques œuvres de Melozzo da Forli, sept fragmens de peintures qu’il avait préparées pour le maître autel. Le même cardinal Jacopo Stefaneschi, vrai Mécène romain, qui lui avait commandé ces différens ouvrages, lui fit exécuter aussi, dans l’église de Saint-George au Vélabre, des fresques qui ont entièrement péri. De celles qu’il exécuta à Saint-Jean de Lateran, il ne reste dans cette basilique qu’un seul fragment sur un pilastre : le portrait du pape Boniface VIII. Il n’en est pas moins évident que Giotto a beaucoup travaillé dans Rome et qu’il y a exercé une remarquable influence, attestée par toute une école. De cette école on retrouvait il y a quelques mois d’intéressantes peintures dans l’abside de Saint-Sixte le Vieux, sur la voie Appienne, et on en retrouvera d’autres encore à mesure qu’on fera disparaître çà et là le badigeon moderne. Jean, l’un des Cosmati, en fut membre ; mais le plus célèbre disciple de Giotto à Rome fut Pietro Cavallini, le seul artiste que l’histoire de la peinture romaine puisse enregistrer pendant le XIVe siècle, alors que la gloire du maître florentin est continuée dans le reste de l’Italie par Taddeo Gaddi, Orcagna, Simon Memmi et tant d’autres. Vasari énumère beaucoup d’œuvres de Cavallini, à Rome, à Assise, à Orvieto ; il raconte qu’il avait conquis l’admiration générale, que ses crucifix et ses vierges opéraient des miracles; malheureusement il ne cite à ce propos aucun témoignage authentique, et nous ne savons sûrement de Cavallini que deux choses : il travaillait à Naples en décembre 1308, au service du roi Robert, et M. de Rossi a retrouvé son monogramme sur la mosaïque inférieure de l’abside de Sainte-Marie du Transtévère.

En vain le retour de Grégoire XI en 1377, grâce aux instances de Pétrarque, de Catherine de Sienne et de la population romaine, avait-il mis fin à la « captivité de Babylone » ; l’anarchie n’en continuait pas moins dans Rome et dans l’église. Les prétentions armées des antipapes, les agitations populaires créées par les hérésies, les