Page:Revue des Deux Mondes - 1879 - tome 35.djvu/895

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

partie du chemin qu’il faudrait faire pour aller jusqu’au centre de la terre : ce que seraient des piqûres d’un millimètre de profondeur sur une sphère de 13 mètres de diamètre, grosse comme une petite maison. Malgré cette pénurie de données positives, il ne sera peut-être pas sans intérêt de résumer l’état de nos connaissances sur cette obscure matière et de montrer par quels côtés la question devient accessible à la science.


I.

La forme extérieure, la figure des planètes peut, jusqu’à un certain point, témoigner de leur origine et de leur condition actuelle. Ces globes légèrement aplatis qui gravitent autour du soleil ont dû s’arrondir sous l’empire des mêmes lois qui façonnent les gouttes de pluie et les grains de plomb : on ne peut se défendre de penser que ce sont des spécimens, dans de plus vastes proportions, de ces « figures d’équilibre » que prennent les masses liquides abandonnées à elles-mêmes, par l’effet des forces intérieures qui assemblent et lient leurs molécules. Tous ces sphéroïdes ont été sans doute ou sont encore des gouttes liquides, et des gouttes aplaties par suite de leur mouvement de rotation. Newton avait deviné l’aplatissement de la terre en partant de cette idée qu’elle avait dû être primitivement liquide ; car la force centrifuge qui naît de la rotation tend à renfler l’équateur aux dépens des régions polaires.

Lorsqu’on fait tourner une fronde, la tension de la corde prouve que la pierre qui est au bout fait effort pour s’échapper ; elle s’envole dès que la corde défaite cesse de la retenir. De même il arrive parfois que des meules de grès que l’on fait tourner trop vite se brisent sous l’effort de la force centrifuge, et que les éclats soient lancés au loin. C’est ainsi que les particules d’une sphère qui tourne sur elle-même tendent à s’éloigner de l’axe de rotation, et cette tendance centrifuge croît depuis les pôles, où elle est nulle, jusqu’à l’équateur, où elle atteint son maximum. Sur la terre, elle a pour effet de diminuer la pesanteur : les corps semblent un peu moins lourds sous l’équateur que sous les cercles polaires. Concevons maintenant la terre entièrement liquide ; les masses équatoriales, chassées par la force centrifuge, s’élèveront, tandis qu’une dépression se produira aux deux pôles. Pour le comprendre, il faut imaginer un siphon dont les deux branches, partant du centre, vont aboutir, l’une à l’un des pôles, et l’autre à un point de l’équateur ; les deux colonnes liquides ne pourront être en équilibre que si la colonne équatoriale, qui contient des molécules plus légères grâce à la force centrifuge, est plus longue que la colonne polaire, où se trouvent des molécules qui n’ont rien perdu de leur poids, La