Aller au contenu

Page:Revue des Deux Mondes - 1879 - tome 35.djvu/902

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

pour la densité du sol (rapportée à celle de l’eau), cela donne 4,25 pour la densité du globe.

L’entreprise de Maskelyne peut être réduite aux proportions d’une expérience de cabinet : on peut donc peser la terre sans sortir de chez soi. C’est ce qu’a fait pour la première fois l’illustre Cavendish. Ce fils cadet du duc de Devonshire, qui sacrifiait ses espérances de fortune à son goût pour les sciences, avait commencé sa carrière pauvrement : « Ses parens, nous dit M. Biot, voyant qu’il n’était bon à rien, le traitèrent avec indifférence et s’éloignèrent peu à peu de lui. « Il s’en dédommagea en devenant un des premiers chimistes de son temps, et lorsqu’il fut célèbre, un de ses oncles, qui avait été général outre-mer, revint à point nommé pour lui laisser un héritage de 300,000 livres de rente. Il laissa lui-même, lorsqu’il mourut âgé de soixante-dix-sept ans, une fortune de 30 millions. Cavendish était ainsi « le plus riche de tous les savans, et probablement aussi le plus savant de tous les riches. »

Cavendish avait reçu de Hyde Wollaston un appareil que ce dernier tenait lui-même, par voie d’héritage, de John Michell, et qui était destiné à mesurer le poids de la terre par l’attraction que deux grosses boules de plomb exerçaient sur deux petites boules suspendues aux deux extrémités d’un levier mobile. Il y avait certainement quelque chose d’inattendu, de bizarre, dans cette idée de vouloir observer l’attraction d’une boule de plomb, qu’on est habitué à regarder comme une masse inerte, — de vouloir constater de visu la part infinitésimale qu’elle prend à l’œuvre de la gravitation universelle. On y réussit pourtant. Cavendish perfectionna l’appareil de Michell en y appliquant le principe de la fameuse balance de torsion de Coulomb, — la torsion d’un fil opposée comme force modératrice à l’attraction qui agit sur un levier porté par ce fil.

Ses expériences furent communiquées à la Société royale de Londres en 1798. Voici, en deux mots, comment se faisaient les observations. Un levier horizontal de sapin était suspendu à un fil métallique fixé au plafond d’une chambre fermée ; à ses deux extrémités, il portait deux petites balles et deux lames d’ivoire sur lesquelles étaient tracées des divisions ; deux lunettes, enchâssées dans les murs de la chambre et dirigées sur ces divisions, permettaient de suivre du dehors tous les mouvemens du levier. Enfin deux grosses boules de plomb, pesant chacune 158 kilogrammes et soutenues par une règle tournante, pouvaient à volonté être éloignées ou rapprochées des deux balles par un mécanisme que l’on manœuvrait encore de l’extérieur. Or toutes les fois qu’on les rapprochait des petites balles, on voyait celles-ci obéir à l’attraction des masses de plomb ; elles se déplaçaient, puis oscillaient autour d’une nouvelle position d’équilibre où la réaction de torsion du fil