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Page:Revue des Deux Mondes - 1879 - tome 36.djvu/778

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fracas de la guerre, les expéditions scientifiques abandonnées, les rêves de découvertes envolés, seuls les baleiniers anglais ou américains explorent les côtes des îles australes. Les premiers qui viennent dans les parages de la Nouvelle-Zélande n’ont pas besoin de longs efforts pour compléter de gros chargemens. La pêche bientôt trop active, le nombre des baleines diminue ; on s’en apercevait déjà en 1805. Les chasseurs de phoques trouvent vite à s’enrichir ; pénétrant dans les criques où les animaux marins aiment à se reposer sur les plages rocailleuses, ils font grand carnage. Le navire armé pour une expédition et approvisionné pour la durée de la campagne arrive sur la côte qu’on juge propice ; les chaloupes sont mises à la mer, et les matelots courent dans diverses directions, afin de reconnaître les bons endroits. Le choix arrêté, de petits détachemens composés de huit à dix hommes disposant d’un canot, d’armes, d’engins de chasse et de pêche, de provisions de bouche, s’établissent à poste fixe et demeurent dans l’abandon et l’isolement sur des rives désertes ou inhospitalières. Le vaisseau, qui reste aux mains des hommes les moins vigoureux, cherche un refuge dans un havre bien abrité des vents ; après plusieurs mois de séjour, une année peut-être, c’est la fin de la campagne, il met à la voile pour aller recueillir les matelots disséminés ainsi que les produits de leur chasse et de leur pêche. Parfois se passent de terribles drames. Épuisés par les fatigues et les privations, les pêcheurs attendent avec une fiévreuse anxiété le moment où ils doivent être rembarqués ; ils comptent les jours, du regard scrutant l’espace, cherchant à toute minute vers l’horizon la voile où chacun met l’espoir d’être ramené dans sa patrie, — vaine attente : le navire a fait naufrage ; les malheureux vont périr dans la dernière misère. Par aventure, des marins, trop longtemps séparés de leurs compatriotes, se sont liés avec les indigènes, ils en ont adopté le genre de vie et, captivés par des femmes, ils iront augmenter la population d’une tribu de la Nouvelle-Zélande. Ailleurs, un détachement attaqué par une nuée de naturels, a succombé ; il a fourni la pâture aux anthropophages, et, lorsque approche de la côte le navire qui cherche à reprendre son équipage dispersé, partout le silence règne : aux cris d’appel, seul répond l’écho.

Baleiniers et chasseurs de phoques, excités par l’ardeur pour le gain, fouillaient toutes les anfractuosités du rivage ; ils donnaient ensuite des indications plus ou moins précises sur les lieux qu’ils avaient visités. Ainsi des notions géographiques se répandirent parmi les marins qui fréquentaient la mer du Sud. Des armateurs expédiaient des navires dans l’Océan-Pacifique en vue de la pêche de la baleine ; les capitaines à la recherche de régions encore inexplorées firent plus d’une découverte. En 1806, Abram Bristow,