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sans dignité? Est-ce encore là une affaire de détail ou une question de principe? Qu’est-ce que l’article 7 de la loi sur l’enseignement supérieur, qui prive des citoyens français de leurs droits, et tels articles de la loi sur la réorganisation du conseil supérieur de l’instruction publique qui enlève à la justice universitaire ses meilleures garanties, sinon une profonde atteinte à la liberté de conscience et à la liberté de défense? Est-ce encore là une affaire de détail ou une question de principe? Qu’est-ce que cette épuration systématique des administrations publiques, sans égard pour la probité, la capacité, les services, sur le simple soupçon d’hostilité aux institutions actuelles, ou sur les dénonciations d’ennemis ou d’envieux, sinon le mépris de toute justice administrative, l’oubli de toute règle de bonne administration? Est-ce encore là une affaire de détail ou une question de principe? Et cette expulsion en masse des écoles communales, poursuivie avec une aussi implacable logique contre des citoyens qu’on exclut du droit commun, uniquement à cause de leur robe, bien qu’ils aient satisfait à toutes les prescriptions de la loi, tout cela au mépris des droits et des vœux des familles révoltées de voir ainsi la chose de tous, la commune, ou l’état, livrée aux passions de parti? Est-ce toujours là une affaire de détail ou une question de principe? Toutes ces lois et ces mesures ne forment-elles pas un programme assez complet de politique intolérante, illibérale, vraiment jacobine? A-t-on bonne grâce à venir dire au parlement : « Laissez-nous en finir avec ces petits détails pour pouvoir commencer la grande entreprise de travaux qui doit assurer la prospérité du pays? » Et peut-on s’étonner que de sincères et fermes républicains refusent leur adhésion à une telle politique?

Après de tels actes, toute déclaration est vaine, toute explication superflue. Le programme du ministère actuel a sa formule aussi claire que possible, et ce qui est plus décisif, il est en pleine exécution. Le programme de l’opposition républicaine, libérale et conservatrice, est tout tracé : c’est une protestation énergique, éclatante de chaque jour, de chaque heure, contre ces lois et ces mesures qui portent atteinte aux libertés publiques, désorganisent nos administrations, troublent profondément la paix du pays, arrêtent tout court l’œuvre de réorganisation sociale à laquelle M. Thiers avait convié le parlement après nos désastres. Voilà donc une situation plus simple, où la politique d’équivoque va devenir plus difficile à maintenir. Après de tels faits, l’union des gauches n’est plus possible. L’évocation du spectre monarchique ne peut plus avoir d’effet devant la réalité qui frappe tous les yeux. Les voix républicaines qui ont défendu, dans le parlement et dans la presse, la cause de la liberté, de la justice, de la paix sociale, ont créé un