un lien religieux parfaitement volontaire. C’est un domaine intime où l’état n’a pas même à entrer parce qu’il n’a pas de sanction pour ce genre d’engagemens : il ne les connaît pas, il ne les protège pas, il ne peut pas les interdire.
Si les membres de ces communautés manquent aux lois, on peut les frapper. S’ils ont des maisons d’éducation, on peut les contrôler et les surveiller, on est armé contre eux de toutes les prérogatives de l’autorité publique. S’ils essaient de se dérober aux conditions de la vie civile, on peut les forcer à s’y soumettre. On a les inspections pour les observer, les tribunaux pour les juger, les administrations financières pour surprendre et réprimer l’irrégularité de leurs transactions. S’ils n’ont mérité par aucun crime ou par aucun délit une déchéance, où est le motif plausible de leur enlever par voie d’exception ce droit d’enseigner qu’ils n’ont perdu ni par l’indignité ni par l’incapacité ? Leurs opinions sont dangereuses, dit-on. D’abord les opinions ne donnent ni n’enlèvent un droit, et si elles sont dangereuses, il n’y a qu’à les combattre ; on ne les supprimera pas par l’exclusion de quelques religieux, ni même d’un ordre tout entier. C’est parce que la majorité du sénat l’a senti qu’elle s’est refusée à voter cet article 7, qui sacrifiait des garanties de liberté sans profit possible, qui n’était qu’un acte vexatoire comme prohibition d’enseignement et un acte périlleux comme mesure politique.
Qu’à cela ne tienne ! s’écrient aussitôt ceux qui ne peuvent garder leur sang-froid devant une robe noire, ceux qui sont toujours impatiens de précipiter la république dans ces conflits de religion, dans ce qu’ils appellent la « guerre au cléricalisme ; » qu’à cela ne tienne ! l’article ? était un minimum, une transaction, un moyen offert aux congrégations de se faire oublier en perdant le droit d’enseigner. L’article 7 est repoussé, il reste l’expulsion, la dissolution des communautés non autorisées, l’action par voie administrative, l’exécution des « lois existantes. » C’est bien aisé à dire ; mais c’est là précisément ce qu’il y a de plus obscur, de plus incertain. C’est la question de savoir quelles sont ces « lois existantes, » quelle en est l’autorité et l’efficacité, dans quelle mesure ces lois, qui datent de tous les temps, qui le plus souvent ont été faites sous l’empire de circonstances particulières, s’appliquent à ce phénomène tout moderne de communautés qui se sont développées dans le droit commun, dans la liberté et par la liberté.
Où sont-elles donc ces lois qui permettraient d’expulser, de dissoudre, de disperser tout ce qui est gênant ? On n’aura pas recours sans doute à d’anciens édits, à des édits de Louis XV contre les jésuites. Ce serait par trop risible, ce serait dans tous les cas un spectacle curieux et édifiant à offrir au nom de la république ! La loi de 1790 a eu pour objet, il est vrai, de mettre fin à tout le système des corporations anciennes.