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LE

SALON DE Mme NECKER

D’APRÈS DES DOCUMENS TIRÉS DES ARCHIVES DE COPPET.


II[1].

LES GENS DE LETTRES ET LES PHILOSOPHES.


I.

La rue Michel-le-Comte, où M. et Mme Necker s’établirent au lendemain de leur mariage, était alors, comme aujourd’hui, perdue au fond du Marais, entre la rue Saint-Martin et la rue du Temple. Courte, étroite, obscure, elle est maintenant occupée presque tout entière par des marchands de meubles ou des fabricans de bronzes. Il n’y a guère que deux hôtels, avec leur large porte cintrée, leur cour spacieuse, leurs hautes fenêtres, où l’imagination puisse rétablir les bureaux d’une maison de banque au XVIIIe siècle. C’est probablement dans une de ces deux maisons que la fille du pasteur de Crassier se vit transplantée, et que, peu faite encore aux devoirs de sa nouvelle situation, ayant conservé quelque chose de son apparence et de ses manières villageoises, elle avouait plus tard avoir éprouvé un singulier embarras en se trouvant maîtresse d’une immense maison, entourée d’un nombreux domestique, avec un gros livre de ménage à la main, comptant sans cesse sans savoir ce qu’elle faisait. Mais la conscience de son

  1. Voyez la Revue du 1er janvier.