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Cherchons à nous rendre compte des résultats produits par cette tarification. On peut se placer à deux points de vue, celui du transporteur et celui de l’expéditeur.

Le premier est volontiers laissé de côté aujourd’hui; il est cependant impossible de le négliger complètement : si le transport représente un service rendu, il faut que le transporteur trouve un certain profit dans son industrie. Au point de vue de l’exploitation, les résultats sont déplorables : le revenu net est tombé à 12 pour 100 de la recette brute, tandis qu’avant l’annexion il était de 45 ; c’est-à-dire que, pour 100 francs de recette brute, les dépenses sont aujourd’hui de 88 francs au lieu de 55 francs. Le bénéfice net ne représente plus que 1 et 1/4 pour 100 du capital d’acquisition du réseau dans cette contrée si riche, le plus beau fleuron de la couronne de la compagnie de l’Est.

C’est un véritable désastre.

Mais au moins le commerce y a-t-il gagné et doit-il se trouver satisfait du changement de régime? Les apôtres du système allemand font valoir en sa faveur trois considérations principales : sa simplicité, son équité absolue, la réduction des taxes. Entrons dans le détail à ces trois points de vue.

Simplicité. — Nous avons montré que, dans sa conception générale, la tarification française reposait sur des principes simples, mais on objecte que, le nombre des tarifs spéciaux étant très considérable, le commerce ne peut s’y reconnaître et trouver ceux dont il a besoin. Cette plainte n’est pas sérieuse et n’a jamais été faite par un commerçant véritable. Qu’un théoricien, qu’un économiste, qu’un homme d’état veuille posséder tous les tarifs et y démêler les conditions diverses de l’industrie, il y aura pour lui une difficulté grande, nous en convenons; il n’est donné qu’à un petit nombre de spécialistes de posséder cette question; mais qu’on veuille bien observer que cette science n’est autre que celle de l’industrie elle-même dans toute la France, et il est dès lors tout naturel qu’elle soit ardue et laborieuse.

Dans la pratique, les choses ne se passent pas ainsi. Pour chaque industriel, l’étude des tarifs est circonscrite à un petit nombre de matières et souvent à un certain rayon géographique. Qu’importe à un raffineur de sucre le tarif de la pierre à bâtir ou du ciment? Qu’importe à une verrerie le tarif du sucre ou du minerai de fer? L’industriel a besoin de connaître les prix de transport des quatre ou cinq matières premières qu’il emploie et ceux du produit qu’il fabrique. En une heure, il peut établir tous ces prix, et s’il survient quelque complication, il a un moyen bien simple de la lever, c’est de s’adresser à l’agent local de la compagnie, qui lui indique tout de