maître d’école Jean, l’autre à Hilla van den Berghe. Il félicite le maître d’école de la faveur que Dieu lui a faite en lui confiant son tabernacle, son épouse. Il le compare à saint Jean, à qui Marie fut confiée. Avec quel bonheur, si l’ordre le permettait, il échangerait sa place contre la sienne ! Il le supplie d’écrire toutes les merveilles dont il sera témoin. Sa patrie va être pour lui un exil; il y sera comme Adam chassé du paradis terrestre. La lettre à Hilla van den Berghe a beaucoup de charme. Il la complimente, sans nul embarras, sur sa chasteté et sa simplicité.
De Calmar (3 janvier 1280), Pierre écrit de nouveau à Christine, à Jean et aux béguines de Stommeln. La lettre à Christine est d’une mysticité plus ardente que jamais. Plusieurs évidemment souriaient de ses transports. « Eh bien! dit-il, que le monde crie, qu’il raille, qu’il médise, qu’il s’irrite, il ne m’empêchera pas d’aimer l’épouse de mon Dieu, de l’aimer pour son époux même. » Nul danger qu’il aime Christine plus que le Christ; car il est de règle que « ce pourquoi est une chose est plus que cette chose. » Christine est la voie qui l’a conduit à honorer, à aimer, à goûter le Christ. Pierre félicite Jean de ce que Dieu l’a constitué « domestique, secrétaire et chapelain de son épouse, « Il eût été si heureux, lui, d’une seule des trois charges!
Pierre reprend ses fonctions de lecteur à Wisby. Les lettres de Christine des années 1280, 1281, 1282 sont remplies par le récit d’épreuves démoniaques plus cruelles encore que les précédentes. Maître Jean sert de secrétaire, et parfois raconte directement ces étranges accidens. Les démons arrivent à des excès vraiment incroyables : un jour ils coupent la tête de Christine; ce qui n’empêche pas l’extatique de triompher d’eux, et d’avoir la force de souffrir le purgatoire pour le curé. Le maître d’école, loin de modérer son imagination, l’encourage à de vraies folies.
La pauvre fille a d’autres soucis plus sérieux : elle songe à placer son frère Séguin et à le faire entrer dans l’ordre de Saint-Dominique. Tout le monde est devenu bien pauvre à Stommeln. Le maître d’école a perdu ses élèves; il meurt de faim. Il va être ordonné prêtre; Pierre enverra de Suède les ornemens nécessaires pour sa première messe. Christine supplie de nouveau frère Pierre de venir. Sans lui, rien ne marche à Stommeln. Si le maître d’école est obligé de partir, que deviendra-t-elle? Tous deux songent à quitter le pays et à se retirer auprès des dominicains de Suède. Les dominicains de Cologne les aident, mais se font prier. Séguin entre dans l’ordre le 29 août 1282 ; il a fallu pour cela l’intervention la plus active de Pierre. Le maître d’école et son frère voudraient bien aussi être admis. Mais, aux yeux des chefs de l’ordre, les raisons