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LE

SALON DE Mme NECKER

D’APRÈS DES DOCUMENS TIRÉS DES ARCHIVES DE COPPET.

IV.

LES AMIS. — MOULTOU, BUFFON, THOMAS.


« L’amitié, chez les femmes, est peut-être plus rare, disait un écrivain du siècle dernier, mais il faut convenir que lorsqu’elle s’y trouve, elle doit être aussi plus délicate et plus tendre. Les hommes en général ont plus les procédés que les grâces de l’amitié. Quelquefois en soulageant ils blessent, et leurs sentimens les plus tendres ne sont pas fort éclairés sur les petites choses. Les femmes au contraire ont une sensibilité de détail qui leur rend compte de tout. Rien ne leur échappe : elles devinent l’amitié qui se tait ; elles encouragent l’amitié timide ; elles consolent doucement l’amitié qui souffre. Avec des instrumens plus fins, elles manient plus aisément un cœur malade ; elles le reposent et l’empêchent de sentir ses agitations. Elles savent surtout donner du prix à mille choses qui n’en auraient pas. Il faudrait donc peut-être désirer un homme pour ami dans les grandes occasions, mais pour le bonheur de tous les jours, il faut désirer l’amitié d’une femme. »

Celui qui, dans un Essai sur les Femmes, écrivait ces lignes, dictées par un sentiment si fin et si noble, avait dû à Mme Necker de connaître et il lui avait fait goûter en échange ce bonheur de