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dans les impôts directs, cela est vrai, sauf néanmoins que beaucoup de choses, comme les rentes, les créances hypothécaires échappent à tout impôt. Mais les impôts indirects, les impôts de consommation, les impôts qu’on peut appeler personnels au premier degré, et qui aujourd’hui sont la mamelle du fisc, puisqu’ils atteignent un chiffre qui va sans cesse en se développant, ne sont trop évidemment, comme on l’a dit avec raison, que des impôts progressifs à rebours, ou en d’autres termes, tombent d’autant plus lourdement sur les contribuables qu’ils sont moins riches. »

L’exposé des motifs ajoute que, dans le système de l’assemblée constituante de 1791, si l’impôt personnel était égal pour tous, l’impôt mobilier au contraire était progressif. Plus tard, lorsqu’on a fait de cette dernière contribution un impôt proportionnel, on a changé l’équilibre que le législateur de 1791 avait entendu établir. Pour revenir à la conception primitive, l’auteur de la proposition est d’avis qu’il y a lieu d’établir la contribution personnelle sur une base proportionnelle.

Les dispositions de la proposition de M. Eymard-Duvernay, relatives à la transformation de la taxe personnelle en impôt proportionnel, sont, à notre avis, inadmissibles. M. Eymard-Duvernay part de cette idée que la loi de 1791 avait fait de la contribution mobilière un impôt progressif. Les lois postérieures l’ayant convertie, selon lui, en taxe proportionnelle, il en conclut que, pour rétablir l’équilibre des charges établi en 1791, il faut créer aujourd’hui une surtaxe additionnelle de 20 pour 100 au principal des contributions foncière, mobilière et des portes et fenêtres.

Le point de départ de ce raisonnement est inexact. L’assemblée constituante a fondé tout son système fiscal sur la base de l’égalité proportionnelle. La taxe mobilière a été établie, dès l’origine, proportionnellement au revenu présumé des fonds mobiliers. L’auteur de la proposition a confondu les procédés d’évaluation du revenu mobilier, admis par la loi du 13 janvier 1791, avec le mode de répartition de l’impôt sur les revenus présumés. La loi du 13 janvier 1791 a décidé que le montant des revenus mobiliers serait déterminé d’après des signes présomptifs : les prix des loyers ; et pour arriver à une évaluation plus exacte des revenus de cette nature, elle a suivi une progression graduelle ; elle a admis dix-huit degrés, et à chacun de ces degrés elle a attribué une présomption de revenus suivant une proportion différente. Ainsi, le contribuable ayant un loyer d’habitation au-dessous de 100 livres était présumé avoir un revenu seulement du double, tandis que le revenu de celui qui avait un loyer de 2,000 livres était évalué au sextuple ; celui qui payait 12,000 livres de loyer était présumé avoir un revenu douze fois et demie supérieur au loyer. Mais, sur