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l’impuissance de ces guerres contre les croyances et la nécessité de la paix religieuse pour l’Allennagne.

Les élections d’Italie, décidées et accomplies en quelques jours, n’ont été qu’une crise rapide et ont eu à peine le temps d’émouvoir le pays. Elles avaient cependant une certaine importance dans la situation confuse des partis, et si le coup de théâtre des élections anglaises ne s’est pas reproduit au-delà des Alpes, le résultat ne laisse pas d’être significatif. Le ministère Cairoli-Depretis, il est vrai, sort victorieux de la lutte, il garde du moins en apparence et pour le moment une majorité assez marquée. Les dissidens de la gauche qui ont pour chef M. Crispi, M. Nicotera, M. Zanardelli, et qui ont contribué par leur vote contre le ministère à précipiter la dernière dissolution de la Chambre, ont peu gagné, s’ils n’ont pas perdu : ils reviennent à peu près au nombre de 50 au parlement. Les anciens libéraux modérés qui formaient jadis la droite et qui se sont ralliés sous le nom bien trouvé de parti constitutionnel, sont peut-être ceux qui ont le plus d’avantages au scrutin. C’est pour eux une demi-victoire qui s’explique tout naturellement sans doute. Les modérés avaient essuyé il y a quatre ans une défaite dépassant tellement toute mesure qu’un retour d’opinion était presque à prévoir, et le spectacle de confusion, d’impuissance que la gauche a offert depuis son arrivée au pouvoir a vraisemblablement fait le reste. Les libéraux modérés étaient moins de 100 dans la dernière chambre ; ils se retrouvent dans la chambre nouvelle au nombre de plus de 160, avec leurs chefs naturels, M. Sella, M. Minghetti, M. Visconti-Venosta, M. Spaventa, M. Bonghi, tous orateurs éminens ou hommes d’expérience, vraisemblablement destinés à jouer un rôle dans les prochains débats parlementaires et peut-être même au gouvernement. Les modérés ne sont encore qu’une minorité, mais ils sont une minorité assez importante par le nombre, par le talent pour exercer l’influence la plus sérieuse.

Oui, sans doute, malgré tout, le ministère Cairoli-Depretis garde la majorité, et même cette majorité pourrait devenir complètement prépondérante s’il y avait une réconciliation entre les dissidens de la gauche et le cabinet. Cette réconciliation a été déjà tentée, dit-on, elle le sera encore selon toute apparence. Les ressentimens personnels la rer.vlent peu vraisemblable, et si elle ne se réalise pas, le ministère risque de se retrouver dans une situation assez précaire en face des minorités coalisées. La lutte semble déjà se dessiner ; elle s’accentuera à l’occasion de toutes ces questions de la mouture, de la réforme électorale, des dépenses militaires, qui vont renaître, qui reparaissent dans le discours par lequel le roi Humbert a ouvert ces jours derniers le parlement. Ce qui reste le plus clair dans cette situaiiou nouvelle, c’est que les influences modérées ont retrouvé de la force en Italie.

CH. DE MAZADE.

Le directeur-gérant, C. Buloz.