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Page:Revue des Deux Mondes - 1880 - tome 40.djvu/551

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manuels nous manquent. Celui qui veut entreprendre des recherches sur un point donné perd bien des heures à chercher dans les bibliothèques ce qui a été écrit sur la matière ; il n’arrive pas à se rendre compte de l’état de la science pour la question même qui l’occupe, encore moins se met-il au courant des questions voisines, et il risque d’user ses forces à démontrer de nouveau ce qui a été déjà mis au-dessus du doute ; il s’expose, comme on dit familièrement, à enfoncer des portes ouvertes.

L’ordonnance du Manuel de l’archéologie de l’art est des plus simples. Il s’ouvre par une introduction où l’auteur définit l’art et particulièrement les arts plastiques, en établit la division et indique les principaux ouvrages à consulter, ceux auxquels il aura sans cesse à renvoyer dans le cours de son travail. Vient ensuite, coupée par périodes, l’histoire de l’art grec et romain, depuis les origines jusqu’au moyen âge ; certains paragraphes, ceux qui sont consacrés aux Étrusques, par exemple, et aux peuples de l’Orient, portent le titre d’épisodes ou d’appendices. À cette histoire sommaire succède ce que Muller appelle la partie systématique, il ne s’y place plus au point de vue du développement organique, mais il prend l’art antique dans son ensemble et il l’étudié en lui-même, dans les matériaux qu’il emploie, dans les procédés qu’il applique, dans les conditions qui s’imposent à lui, dans les caractères qu’il prête aux formes, dans les sujets qu’il traite, dans la répartition de ses monumens sur toute la surface du terrain occupé par la civilisation ancienne. La Grèce des beaux siècles s’est surtout attachée à représenter ces êtres supérieurs à l’humanité et pourtant revêtus de la forme humaine, ces enfans de son imagination dans lesquels elle personnifiait les lois éternelles, les forces de la nature et celles du monde moral ; c’est en cherchant à créer et à distinguer ces types, à leur prêter des traits qui fussent dignes de leur majesté, que l’art grec a produit ses œuvres les plus nobles et les plus idéales. Le manuel devait donc comprendre et comprend en effet toute une histoire des dieux et des héros par les monumens, toute une mythologie de l’art, comme on dit en Allemagne. C’est elle qui tient la plus grande place dans la seconde partie de l’ouvrage.

Ce plan a été l’objet de plusieurs critiques ; nous n’entendons ni les repousser ni même les discuter ici. Ce qu’il faut avant tout, dans un ouvrage de ce genre, c’est être clair et complet ; or le livre a au plus haut point ces deux mérites. Les recherches y sont faciles, et l’auteur, par un puissant effort de lecture et de réflexion, a su condenser et classer, en un seul volume d’un format commode, tout ce qu’il y avait d’intéressant dans les résultats auxquels avaient abouti les recherches de plusieurs générations d’archéologues. Ce