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sans cesse, et quand je jouis de ce plaisir, cette seule idée m’occupe. Oui, maman, quand je vivrois mille ans pour vous contempler, si vous retourniez un instant la tête, il me semble que j’en serois encore jalouse. Adieu, ma tendre maman ; au travers de toutes mes folies daignez voir que vous êtes aimée comme… que dirai-je de plus fort, que : comme vous le méritez. Permettez-moi de vous embrasser mille fois, en vous serrant contre un cœur qui est à vous seule et à mon papa.

Je suis avec respect
votre très humble et très obéissante fille,
Necker.

P.-S. — Nous vous envoyons les plus belles fleurs de notre jardin.


Parfois ce n’était pas le témoignage de sa tendresse, mais l’expression de ses remords, que Germaine Necker adressait à sa mère, à la suite de quelques fautes légères dont elle s’accusait comme d’un crime :


Ma chère maman,

Je ne me résous qu’avec peine à vous écrire. Si je me sentois digne de vous, digne de vos leçons, je jouirois avec transport du bonheur de vous faire hommage de mes progrès et de vous en remercier chaque jour, mais lorsque je ne puis vous offrir que la honte et la confusion de retomber sans cesse dans les mêmes fautes, la plume m’échappe des mains, je m’abandonne au découragement, à la tristesse. Oui, ma chère maman, le croiriez-vous, hier au soir même, j’ai retombée dans mon humeur ordinaire, et ce matin encore sur un autre objet. Épargnez m’en le détail, j’ai trop de peine à parler de cet asticotage minutieux. Il me semble qu’en l’écrivant je le consacre, qu’alors il me sera impossible de le faire oublier. D’ailleurs je me défie de ma foiblesse ; je craindrois qu’en écrivant, je ne voulusse retrancher un mot ; je sens qu’il me seroit impossible de tout dire, je rougirois de ne pouvoir vous entretenir que de mes fautes ; pourquoi n’ai-je pas à vous raconter les victoires que j’aurois remporté sur moi. Ah ! maman, ma chère maman, corrigez-moi.

Il fait très beau temps, c’est ce qui m’empêche de continuer n’ayant personne qui puisse attendre jusqu’à ce soir.

Adieu, ma chère maman, permettez-moi de vous embrasser.

Votre très-respectueuse et très obéissante fille,
Minette Necker.