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passage de l’un de ces établissemens à l’autre devait être facile. Il faut que l’enfant de onze à douze ans, auquel on a reconnu des qualités d’esprit remarquables et qui veut faire ses classes, ne se trouve pas dépaysé, en entrant en sixième, et hors d’état de suivre ses camarades. C’est ce qui a engagé, malgré des objections graves, à maintenir la première période de nos études dans les limites d’un bon enseignement primaire. Mais la même raison n’existait plus pour les classes élevées ; aussi était-il difficile de comprendre pourquoi l’administration avait tenu à ne commencer l’étude du grec qu’en troisième. Les argumens qu’on peut alléguer contre cette mesure funeste ont été résumés avec beaucoup de force dans une note que l’association pour l’encouragement des études grecques a présentée au conseil supérieur. « La mémoire complaisante d’un enfant de onze à douze ans, disait-elle, retient à merveille les formes compliquées des déclinaisons et des conjugaisons grecques, et sa jeune intelligence prend plaisir à chacune des petites conquêtes qu’elle fait dans ce domaine. Trois ans plus tard, l’esprit de l’élève est devenu plus dédaigneux et plus exigeant : il s’intéresse davantage aux sentimens et aux idées, et d’autre part il n’est pas assez mûr encore pour découvrir dans l’étude des faits grammaticaux l’intérêt philologique qu’un esprit plus avancé pourrait y trouver. Il se rebute donc et se décourage. L’expérience d’un enseignement commencé trop tard a été fait il y a quelques années pour les langues vivantes ; elle a été décisive. Ce n’était pas seulement la prononciation qui laissait à désirer, c’était la connaissance même de la grammaire et du vocabulaire. La difficulté serait bien plus grande encore avec une grammaire et un vocabulaire aussi riches que ceux du grec ancien. Quels que fussent les méthodes employées et le zèle des professeurs, on ne saurait arriver d’emblée à lire Homère Démosthène, ou même Xénophon. Les débuts seront toujours longs et ils sembleront à l’élève d’autant plus fastidieux, que son goût littéraire, déjà éveillé par les autres enseignemens de la classe trouvera moins de satisfaction dans les exercices arides auxquels il sera d’abord assujetti. On demande avec raison que l’enseignement secondaire fasse connaître aux élèves plus de textes anciens qu’il ne l’a fait jusqu’ici. Comment espérer qu’ils lisent désormais plus de textes grecs s’ils apprennent l’alphabet à quatorze ans et sortent du lycée à dix-sept ? » L’association concluait en. demandant que le grec fût commencé au début, tout au moins au milieu de la classe de cinquième ; le plan d’études le reculait jusqu’en troisième. Après une très vive et très longue discussion, le conseil à une forte majorité, a pris un terme moyen ; il a décidé qu’on entamerait le grec avec la quatrième, et pour que l’étude en fût