la pose traditionnelle et dont le style rappelle celui de la treizième dynastie. Mais le roi de ces deux colosses s’appelle de son prénom Ra-dmenkh-ka et, de son nom, Mer-schos-ou, ou Mer-schos, c’est-à dire le chef des schos ou des pasteurs. Aussi haut que l’on puisse remonter dans l’histoire des Hycsos, on les trouve donc employant l’écriture hiéroglyphique, adorant les dieux égyptiens, respectant l’écriture, les arts, le culte des vaincus. La suite de leur histoire ne dément pas la douceur de ces débuts. Sans doute il dut y avoir dans la conquête des pasteurs, comme dans la conquête. perse, quelques heures de réaction brutale, de fanatisme destructeur. Cambyse, lui aussi, après s’être montré plein de condescendance pour les mœurs religieuses de l’Égypte, eut des retours de vandalisme qui aboutirent à de terribles dévastations ; en a-t-on jamais conclu que les Perses fussent des barbares ? Si l’histoire de Manéthon nous était parvenue tout entière, il est vraisemblable que nous y eussions lu contre tous les conquérans de l’Égypte sans exception les mêmes diatribes que contre les Hycsos. Étant les seuls sur lesquels son témoignage nous soit resté, ils ont porté tout le poids des haines et des indignations nationales. Mais leur procès est à réviser ; il n’est plus possible de les juger uniquement sur la foi du vaincu.
C’est dans la salle des Hycsos du musée de Boulaq que la cause pourrait être plaidée avec le plus de fruit On y verrait non-seulement que les pasteurs n’ont pas tout renversé sur leur passage, mais qu’au contraire ils ont construit à leur tour des monumens dont les débris attestent une civilisation puissante. En fouillant le sanctuaire du grand temple de Tanis, qui était précédé, comme tant d’autres sanctuaires égyptiens, d’une avenue de sphinx, M. Mariette a trouvé quatre de ces sphinx encore debout. Ce sont d’admirables colosses de granit noir d’environ 2m, 50 de longueur, d’une ampleur et d’une précision d’exécution, d’une souplesse de modelé, d’une vigueur d’attitude qui rappellent les meilleures époques de la sculpture égyptienne. Mais si le corps est indigène, la tête est tout à fait étrangère. « Les sphinx d’origine égyptienne, a dit M. Mariette, frappent surtout par leur tranquille majesté. Les têtes sont le plus souvent des portraits, et cependant l’œil est toujours calme et bien ouvert, la bouche toujours souriante, les lignes du visage toujours arrondies. Surtout remarquez que les sphinx égyptiens n’abandonnent presque jamais la grande coiffure aux ailes évasées (le klaft), qui se marie si bien à l’ensemble paisible du monument. Ici vous êtes loin de reconnaître ce type. La tête du sphinx de San est d’un type auquel je ne saurais véritablement rien comparer. Les yeux sont petits, le nez est vigoureux et arqué en