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alimentaires à l’huile qui seraient chèrement achetées par les musulmans riches, leur religion leur défendant expressément l’usage de la graisse de porc. Et tout cela serait encore de peu d’importance en comparaison des échanges qui s’établiraient à Mang-hao entre nos produits et ceux des riches mines du Yunnan dès que la navigation du Fleuve-Rouge serait protégée par nous. L’industrie minière, détruite paria longue guerre qui a désolé cette province, reprendra son essor dès que la tranquillité sera rétablie, et la route de Mang-hao au Tonkin débarrassée des bandits qui, sous les noms de Pavillons-Jaunes et de Pavillons-Noirs, la désolent.


III

Lorsqu’on quitte Mang-hao pour se rendre en bateau à Lao-kaï, on rencontre de nombreux ruisseaux et plusieurs rivières qui grossissent progressivement le Fleuve-Rouge jusqu’à la mer. Le premier village que l’on trouve sur sa route est celui de Yang-ming, où, dit-on, il y a des mines d’or. Plus loin, après avoir franchi divers rapides et constaté la présence de roches de fer pur, s’élève un autre village chinois du nom de Sin-kaï, et un peu plus bas, un endroit appelé Long-Pô ; un poste de Braves qui surveille ou du moins est censé surveiller la frontière s’y trouve établi. Long-pô possède des mines importantes de cuivre qui ont été exploitées autrefois avec avantage. Il y a là un étroit passage où le Fleuve-Rouge coule avec fracas entre une rangée de rochers noirs qui laissent à peine entre eux un espace de 30 à 40 mètres. Ces rochers sont des agglomérations de minerais de cuivre. Les riverains du fleuve, de Mang-hao à Lao-kaï, s’appellent Paï-y ; il se trouve également d’autres Paï-y indépendans dans les montagnes environnantes ; ceux-ci sont des hommes un peu timides, forts et grands de taille. Les Paï-y des rives sont moins robustes. Une des vallées qu’ils habitent porte le nom de Pa-cha-kaï ; elle est d’une grande fertilité et entièrement entourée de belles montagnes boisées. La nature semble s’être plu à en faire un des plus frais et des plus charmans sites de cette région. En approchant de Lao-kaï, l’aspect du pays est également très beau en raison de la splendide végétation qui s’étend sur les mamelons et les pics sans nombre qu’on découvre à droite et à gauche du fleuve. C’est ici que commence la région des forêts qui s’étendent sur tout le territoire des peuples indépendans jusqu’au-dessous de Kouen-ce. La flore y est de toute richesse et couvre jusqu’aux sommets les plus élevés ; partout ce sont des fourrés impénétrables au milieu desquels se détache la fleur écarlate des hibiscus ; mais il n’est possible de s’y frayer un