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1,500 hectares de la forêt de Saint-Germain. Il y a là une responsabilité grave à encourir ; nous adjurons tous ceux qui ont à en prendre leur part, de bien peser toutes choses par eux-mêmes avant de s’engager définitivement dans une voie funeste. L’expérience du passé doit prévaloir enfin contre des préjugés trop tenaces. Les argumens par lesquels on cherche aujourd’hui à faire de l’épuration la panacée suprême sont ceux-là même qui servaient autrefois à présenter l’irrigation comme la solution complète et parfaite. On a vu comment l’irrigation a réussi, on a vu comment aujourd’hui on l’abandonne. Le succès de l’épuration sera le même, et de même on reconnaîtra un jour qu’il faut l’abandonner, mais le mal sera fait et les sommes considérables qu’elle aura coûté seront perdues sans retour. Mieux vaut commencer par où l’on doit finir.

Nos conseillers municipaux, nos législateurs ont le choix entre deux systèmes. L’un exige une surface énorme ; sur cette surface il installe l’insalubrité, ou tout au moins des causes certaines d’insalubrité, et cela aux portes de Paris, au milieu d’une contrée de luxe et de plaisance, où l’on condamne la propriété à une dépréciation inévitable ; il mutile une forêt qui procure à une population nombreuse ressources et agrément, et cela dans un temps où par toute la France on se plaint des effets du déboisement, où l’état lui-même cherche à l’arrêter et à provoquer le reboisement ; il fait tort enfin à la fortune publique d’une richesse agricole considérable, et cela au moment même où l’agriculture a le plus pressant besoin d’encouragement et de secours. L’autre système se contente d’un espace vingt-cinq fois plus restreint, deux cent cinquante fois plus restreint même, si l’on table seulement sur la surface d’évaporation ; il est sans nul danger pour la santé publique ; on le peut installer partout où l’on voudra, sans expropriation, sans déboisement, sans plus de gêne que d’insalubrité pour le voisinage ; il assure enfin, au point de vue financier, l’avantage d’une économie considérable. Nous refusons de croire qu’on persiste à préférer le premier système.


E. AUBRY-VITET.