Page:Revue des Deux Mondes - 1880 - tome 41.djvu/912

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de ce nerf, la sensation variera. S’il s’agit du nerf de l’œil par exemple, excitez-le de quelque façon que ce soit, cette excitation ne produira qu’une sensation : celle de lumière. Ainsi agissent les coups sur cet organe : il y a compression, donc excitation du nerf optique, ou sensation de lumière : ce sont les trente-six chandelles du vulgaire. De même pour le nerf auditif, qui ne peut susciter que des sensations auditives ; de même pour tous les nerfs, de sensibilité spéciale ou générale. Or, ce qui est vrai de l’excitation des nerfs sur un point de leur trajet, l’est pour tous les autres. Si donc, au cerveau, nous excitons la région motrice, l’origine des nerfs moteurs se trouve irritée, d’où production de mouvement ; à la région sensitive, même phénomène, mais ici, au lieu de mouvement, il y a sensation, par suite de la connexion des nerfs avec des cellules sensitives.

En résumé, l’électrisation des régions corticales du cerveau agit comme elle le ferait si on les portait sur les nerfs en un point quelconque de leur trajet : la seule différence consiste en ce qu’on les excite en un point plus rapproché de leur origine ; des rapports anatomiques que nous croyons exister entre les fibres blanches et les cellules grises nous concluons à l’existence d’un rôle de centre, joué par ces dernières par rapport aux premières, à l’état normal, sur le vivant.

Ceci dit, abordons le détail des expériences de Ferrier.

Le singe est l’animal qui se prête le mieux à l’expérimentation par le développement qu’acquièrent chez lui l’initiative et la volonté, opposées à l’automatisme si prépondérant chez les animaux inférieurs. Aussi Ferrier a-t-il opéré sur le singe principalement. De ces expériences, avons-nous dit, il résulte que la surface du cerveau contiguë à la voûte et aux parois du crâne peut se décomposer en trois régions distinctes au point de vue fonctionnel : la région antérieure, en arrière du front, paraît affectée à la fonction intellectuelle ; la région moyenne semble renfermer les centres qui président à la mise en action des muscles volontaires ; la région postérieure enfin renfermerait les centres où aboutiraient les impressions faites sur les nerfs sensitifs par les objets du dehors. Ceci revient à affirmer l’existence de trois zones : intellectuelle, motrice et sensitive. La première qui ait été reconnue nettement est la zone motrice ; c’est aussi celle dont l’existence soulève le moins d’objections et de discussions.

En promenant les électrodes sur sa surface, l’on reconnaît en peu de temps la présence de régions nettement limitées, de petites dimensions, dont tous les points président, dans une même subdivision, à la mise en action du même muscle ou groupe de muscles.