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conduite des fourgons et des voitures d’ambulance. A qui pensera-t-on que doive appartenir la direction du service médical, la direction des hôpitaux et des ambulances ? A celui évidemment dont le rôle est prédominant. Le pharmacien n’a d’autre rôle que d’exécuter les prescriptions du, médecin. C’est au médecin qu’il appartient d’indiquer au comptable les objets nécessaires aux besoins des malades et du service médical. C’est donc au médecin, que doit appartenir la direction du service médical, et ce service doit constituer un corps autonome fonctionnant dans les conditions où existent et fonctionnent en France les corps du génie et de l’artillerie.

Quelles sont les objections que l’on fait, ou que l’on peut faire, à cette revendication légitime du corps de santé militaire ? Nous les trouvons formulées et résumées par M. le ministre de la guerre dans le discours prononcé ; par lui à la chambre des députés, dans la séance du 15 juin dernier : « La question, dit M. le général Farre, est délicate ; s’il ne s’agissait que du service en temps de paix, je passerais facilement condamnation. Quel que soit le parti que nous prenions en temps de paix, nous trouverons toujours le moyen de sortir d’embarras, mais en temps de guerre il en est tout autrement. Quand je vois la nature des responsabilités qui incombent en temps de guerre aux directeurs du service de santé, je suis vraiment épouvanté des attributions ou plutôt de la charge qu’on veut faire peser sur le médecin en chef. »

Si quelque chose est capable d’étonner ceux qui connaissent l’état de la question, mais si quelque chose explique aussi trop clairement qu’une déplorable organisation puisse résister même aux condamnations portées par l’expérience, c’est de voir un ministre de la guerre proclamer de pareilles hérésies. A la rigueur, en temps de paix, les mesures à prendre sont en général assez peu urgentes pour que le médecin puisse en référer à l’administration et que son initiative, par conséquent, soit restreinte sans trop de dommage pour le service ; mais c’est précisément en temps de guerre, et on l’a bien compris partout, que le médecin, a besoin de toute son initiative. En quelques heures, ce sont des milliers de blessés qu’il s’agit de relever, d’opérer, de panser, de coucher. Il faut transformer en petits hôpitaux les églises, les maisons, les fermes placées aux environs du champ de bataille ; est-ce l’intendant, ou le médecin qui pourra le mieux apprécier si la situation de telle ou telle maison est suffisamment salubre ? Il faut se créer sur place des ressources de toute nature ; est-ce l’intendant qui saura ce qui convient aux malades ? Il faut quelques heures, quelques jours après la bataille, évacuer sur les hôpitaux d’arrière-ligne ou sur les villes