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un intérêt capital à ce qu’elle ne tombe pas en dissolution, la France et l’Angleterre, et en n’accordant aux autres que les droits restreints dont elles ont besoin pour assurer la protection de leurs nationaux. Or, l’organisation d’un conseil d’état donnerait, au contraire, une impulsion nouvelle aux intrigues et aux luttes d’ambition internationales. Le seul moyen d’arriver à une solution pratique serait de décider que chaque fois qu’il serait nécessaire de recourir à l’adhésion des puissances pour imprimer à une loi le caractère obligatoire réclamé par les tribunaux de la réforme, les puissances nommeraient une commission spéciale chargée d’examiner cette loi et d’en proclamer la légalité à la majorité des voix. Il serait très important que cette commission ne fût nommée que pour une circonstance et avec un mandat particulier ; car, dans un pays comme l’Égypte, où rien ne s’oppose aux empiètemens de toute institution qui se sent assez forte pour s’emparer d’une partie de la puissance publique, une commission permanente attirerait bientôt à elle tous les pouvoirs et deviendrait le véritable gouvernement. Au reste, lorsque la liquidation financière actuelle sera terminée, il n’arrivera presque jamais d’avoir besoin de soumettre une loi nouvelle à l’adhésion des puissances. Rien ne sera donc plus aisé que de nommer à chaque occasion une commission provisoire, dont chacun choisira les membres à son gré soit dans le corps consulaire, soit dans le corps de la magistrature, soit à la caisse de la dette. Il serait sage de décider que les grandes puissances seules feront partie de cette commission ; car il est bien clair que les petites ne sauraient exiger pour leurs nationaux des garanties plus complètes que celles dont les grandes déclareraient se contenter. C’est ce qui vient d’être fait pour la commission de liquidation financière, dont le mandat a été soigneusement limité et dont les membres n’appartenaient qu’aux grandes puissances. Le résultat a été excellent ; l’épreuve a parfaitement réussi. L’exemple est trop bon à suivre pour qu’on ne le suive pas.

Ainsi réglée, l’intervention des puissances dans la législation de l’Égypte deviendrait beaucoup moins dangereuse, beaucoup moins vexatoire qu’elle ne l’a été jusqu’ici. Mais pour détruire les effets funestes de la réforme, il faudrait encore trouver le moyen d’arrêter les empiètemens de la cour d’appel d’Alexandrie, d’abord sur le pouvoir politique du gouvernement égyptien, et secondement sur l’autorité du parquet et des tribunaux de première instance. Nous répétons qu’il serait tout à fait imprudent de laisser subsister telle quelle, dans un pays comme l’Égypte, une cour qui est juge du fait et du droit, qui décide des contestations administratives aussi bien que des contestations civiles et commerciales, qui exerce