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Page:Revue des Deux Mondes - 1880 - tome 42.djvu/649

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un de géographie. — L’objection est toute prête : « Quoi ! dit-on, vous demandez aux candidats d’être prêts à certain jour sur toute l’histoire, et, comme si ce n’était pas déjà trop, sur toute la géographie, et vous n’excluez ni l’histoire des institutions, ni celle des lettres et des arts ! Vous voulez qu’ils puissent traiter raisonnablement, à l’improviste, de tous les sujets compris dans cet immense domaine ! Pourquoi ne pas leur laisser un manuel, un dictionnaire historique, un aide-mémoire ? Vous les transformerez en dictionnaires eux-mêmes au lieu d’eu faire des lettrés et des historiens. Tout au moins vous favoriserez, au détriment du vrai mérite, le savoir personnel, superficiel et médiocre. »

Le reproche tomberait juste si deux conditions importantes n’étaient observées : il faut que les questions soient bien données ; il faut que les compositions soient bien jugées. Sans doute, en présence de questions trop particulières, un esprit distingué peut bien n’avoir pas de souvenirs assez précis ; mais appelez son attention sur les aspects généraux de l’histoire, et aussitôt le souvenir, aidé du jugement et de la comparaison, ne le trahira plus. Demandez-lui, sur un sujet d’importance, non pas la série exacte et complète des faits, mais l’intelligence des différentes phases et la signification générale. Il peut bien n’avoir pas présent à l’esprit le récit chronologique d’une des croisades ; mais il ne sera pas embarrassé, pourvu qu’il ait une instruction générale, d’exposer, dans un résumé suffisamment logique et substantiel, les principaux résultats des croisades, les changemens politiques et territoriaux qu’elles ont entraînés, le progrès scientifique, littéraire, artistique et moral qui les a suivies. Il pourra bien renoncer à la puérile épreuve de raconter sans erreur l’histoire confuse de la Fronde, mais il acceptera d’en caractériser les diverses périodes, d’énumérer les principaux d’entre les mémoires contemporains qui nous en instruisent, et d’apprécier les diverses opinions sur le degré de gravité qu’a offert cet épisode au point de vue de notre histoire générale. Pour peu qu’il ait seulement fait de bonnes études littéraires, il ne se pourra pas qu’il ne sache quelque chose de Retz et de Mme de Motteville ; pour peu qu’il ait réfléchi aux vicissitudes de la France, à ses trop nombreuses révolutions, il ne se pourra pas qu’il n’ait médité sur ces graves paroles qu’adressait le spirituel coadjuteur au prince de Condé : « Il n’y a que Dieu qui puisse exister par lui seul. Autrefois il existait en France un milieu entre les peuples et les rois ; le renversement de ce milieu a jeté l’état dans les convulsions où l’ont vu nos pères… Déclarez-vous hautement protecteur des compagnies souveraines, et, avec leur concours, vous réformerez l’état peut-être pour des siècles… » Paroles divinatrices du passé et de l’avenir, programme éloquent de la double destinée si