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secrets des. cabinets, et plus encore les reporters qui pénètrent malgré vous dans votre maison et enregistrent les plats qu’on sert sur votre tabler mais il ne borne point là ses rigueurs. Écrivains et journalistes, prenons une leçon d’humilité en lisant ce qu’écrit de nous le confrère éminent que la politique nous a enlevé :


En général, les dîners d’hommes ne sont pas amusans. Quand les convives, comme, cela est ordinaire, ont en commun des idées très arrêtées sur la politique, le sport, la littérature, l’armée ou le monde, il en résulte une grande monotonie dans les pensées et les appréciations, et dans les sujets que l’on traite. Dans un dîner d’hommes politiques, la conversation ne tarde pas à rouler sur ce qu’on peut appeler les affaires de la boutique : anecdotes sur les derniers scrutins, critiques des discours prononcés, conjectures sur les nominations ministérielles ou les élections à venir, est surtout sur cette odieuse et intarissable question de la révision des listes électorales. Cependant, de temps à autre, un éclair passager donne à penser que les convives ont une autre existence que celle qui s’écoule entre les murs des deux chambres. Cette circonstance atténuante ne s’applique point aux dîners des gens du sport. On commence par les paris et les handicaps, on finit par les paris et les handicaps ; et l’on a droit de douter qu’il entre dans la tête des convives qu’il puisse exister une combinaison quelconque d’atomes en dehors des handicaps et des paris. Avec un dîner de gens de lettres, la salle à manger devient le vrai palais du silence. La haine et l’envie que tous les écrivains ressentent les uns pour les autres, particulièrement lorsqu’ils échangent dans des dédicaces les effusions d’une mutuelle affection, ne manquent jamais d’assurer dans ces réunions l’agréable impression d’un sentiment général de pénible contrainte. Si un bon mot arrive sur les lèvres d’un convive, il aura soin de le retenir de peur que son voisin, qui est en train de publier un roman dans une revue, n’en fasse son profit dans le numéro suivant, et que lui-même, qui est attelé à une besogne semblable, n’en perde le bénéfice.


Est-ce à dire que, dans la longue série des personnages qui défilent dans les pages d’Endymion, il n’y ait point défigures réelles et reconnaissables ? Il en est trois que l’auteur n’a déguisées que dans la mesure dont les convenances lui en faisaient un devoir, et sur lesquelles on peut mettre un nom à coup sûr. Toutes les trois appartiennent au passé. La reine Agrippine, dont la peinture a immortalisé le gracieux visage, encadré d’abondantes boucles blondes, la souveraine détrônée dont le talent musical est un don de la nature et qui demande aux arts de la consoler de sa grandeur