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toujours uni : on n’aurait le plus souvent qu’à poser purement et simplement les rails dessus. Mais cet avantage est-il suffisant pour compenser une désolation dont on aura une idée par ce fait, que nos compatriotes ont parcouru plus de 800 kilomètres sans rencontrer d’autre habitant sédentaire que le nègre qui garde la Zaouïa de Temacinin, espèce de Robinson du désert perdu au milieu de ce royaume du néant ? Quant aux nomades, ils en virent en tout quatre-vingts, pauvres vagabonds que la faim talonne sans cesse et qui furent reçus et traités par l’expédition, car, par une coutume qui dit assez quelle est leur misère, chez eux c’est l’étranger qui offre l’hospitalité. Sables et cailloux calcinés par un ciel de feu, lignes désespérément monotones, d’un sol dénudé, l’œil n’aperçoit pas autre chose, et l’attristante impression de cette aridité est renforcée encore en quelques endroits par les teintes lugubres que donnent aux terrains les débris de silex noir et de calcaire gris qui les recouvrent. On ne peut guère espérer une résurrection de ce pays maudit. M. Roche estime que l’on trouvera de l’eau de bonne qualité en quantité suffisante pour les besoins du chemin de fer, mais il y a peu de chances de découvrir des nappes artésiennes pareilles à celles qui sont la vie et la fortune de l’Oued-Rhir et de Ouargla.

Le parlement ayant voté un nouveau crédit de 500,000 francs pour la continuation des études du Transsaharien, M. Flatters a quitté Paris au mois d’octobre dernier pour aller reprendre ses explorations. Instruit par l’expérience de la première campagne, assuré des bonnes dispositions des Touareg Azdjers, qu’il a visités, appelé par des avis des Touareg Hoggars, auxquels il a annoncé sa visite, il se promet cette fois de pousser jusqu’au Soudan la reconnaissance du tracé oriental qu’il a entreprise. Quelles difficultés présentera le passage du versant nord au versant sud du Hoggar ? Quels escarpemens rencontrera-t-on sur le versant sud ? La région montagneuse de l’Aïr n’offrira-t-elle point d’obstacles ? Rencontrera-t-on de l’eau partout ? Autant de questions sur lesquelles on a besoin d’être renseigné avant de juger définitivement dans quelles conditions d’exécution se présente ce tracé.


II

M. Pouyanne, ingénieur en chef des mines, avait été chargé d’étudier le tracé occidental en territoire algérien. Une expédition organisée par la société de géographie d’Oran, se joignant aux caravanes indigènes qui vont chaque année au Touat, devait achever la