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des considérations d’ordre technique qui pourront déterminer un choix entre elles.

M. Pouyanne a poursuivi les études vers le sud à partir de Mecheria ; il devait s’engager par l’Oued-Namous, dans la direction du Touat, mais la menace d’une incursion des pillards marocains, qui avait déjà inquiété M. Choisy, l’empêcha de dépasser Tiout, et la mission de la société de géographie d’Oran dut également tourner bride en cet endroit. De sorte que, tandis que les missions attachées au tracé oriental pénétraient jusqu’à 1,500 kilomètres dans l’intérieur des terres, celles du tracé occidental étaient obligées de s’arrêter à 460 kilomètres de la côte. Si fâcheux que soit le fait, il ne rend cependant point impossible dès maintenant une appréciation raisonnée de ce dernier. Nous possédons en effet sur les pays qu’il doit traverser jusqu’au Touat une masse de renseignemens à laquelle les missions avortées auraient donné sans doute plus de précision, mais sans pouvoir beaucoup y ajouter. Le général Colonieu est allé jusqu’au Gourara ; Gérard Rohlfs a visité en détail le Tafilalet, le Touat et le Tidikelt[1]. M. Soleillet est également parvenu jusque dans cette dernière contrée ; une colonne française sous les ordres du général de Wimpfen a parcouru en 1870 le bassin de l’Oued-Guir ; le général de Colomb a réuni une quantité énorme d’informations indigènes sur le Touat dans un résumé dont l’exactitude a surpris tous les explorateurs qui ont pu la vérifier sur les lieux ; enfin M. Sabatier et le capitaine Graulle ont refait pour l’édification de la commission supérieure un travail du même genre. On voit que les autorités ne manquent point.

La partie la plus élevée de la chaîne de l’Atlas est située dans le Maroc, elle dépasse la ligne des neiges éternelles. Il en résulte que les oueds du versant méridional, c’est-à-dire ceux dont le cours appartient au Sahara, tandis qu’ils n’ont le plus souvent que des lits desséchés en Algérie, coulent au Maroc à la surface du sol pendant l’hiver et contiennent en tout temps de l’eau en abondance à quelques mètres de profondeur sous le sable. Le 1er avril 1870, la colonne du général de Wimpfen eut le spectacle d’une inondation en plein désert. « C’était une crue de l’Oued-Guir, dit M. du Casse dans sa relation ; l’eau se précipitant en flots écumeux soulève la poussière qui semble précéder le fleuve, lequel présente alors l’aspect le plus étrange. Le milieu du cours roule des vagues rapides, élevées, tandis que les bords semblent disparaître sous des flocons d’eau saumâtre. On ne tarda pas à distinguer une foule de reptiles : lézards

  1. Les oasis que les géographes comprennent sous le nom général de Touat forment trois groupes principaux : le Gourara, le Touat et le Tidikelt.