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curés peuvent revendiquer comme leur appartenant en propre : la loi est parfaitement maîtresse d’en charger qui elle veut. »

Cette séance du 25 mai n’avait pas suffi au ministre des affaires ecclésiastiques pour exprimer toute sa pensée. La chambre attendait qu’il donnât son opinion sur le rôle et l’influence de la compagnie de Jésus. Le chapitre II du budget des cultes permit à l’évêque d’Hermopolis de compléter son discours. Ayant l’intention de discuter l’accusation intentée au clergé de subir l’esprit ultramontain, il crut utile de rappeler l’exposition de la doctrine de l’église catholique par Bossuet afin qu’on n’essayât pas de se prévaloir des libertés de l’église gallicane pour la détacher du saint-siège. Il ajouta que les Français professaient certaines maximes qui leur étaient plus particulières, consignées dans la déclaration de 1682 ; que ces opinions n’avaient jamais altéré leur respect filial pour l’église romaine; qu’elles étaient seulement le fondement de certains usages et d’une certaine jurisprudence canonique.

Avec une souplesse d’argumentation remarquable, l’orateur expliqua les impressions différentes du jeune clergé par l’abus que la révolution et Bonaparte avaient voulu faire de ces libertés; qu’il fallait distinguer entre l’article qui consacrait l’indépendance des souverains et les trois autres qui portaient sur des faits théologiques; que le temps ferait le reste et qu’on verrait s’établir insensiblement comme autrefois l’uniformité de doctrines sur ces matières. Au milieu des rires de son auditoire, Mgr de Frayssinous s’écria: « Mais n’est-il pas un obstacle insurmontable à la propagation de ces saines doctrines? N’avons-nous pas au milieu de nous ce que nous appelons les jésuites? » Il ne voulut pas approfondir tout ce qui concernait la société de Jésus. Il se borna à quelques réflexions sur la part qu’elle avait dans l’éducation de la jeunesse. Il réduisit l’influence de la compagnie à la direction des sept petits séminaires où elle avait été appelée par les évêques, et, pour faire taire les alarmes, il promit le rétablissement de l’ancienne Sorbonne.

Ces paroles si graves et qui, si on les pénètre, portaient en elles et dans leur désir de conciliation tant de découragement, furent aussitôt relevées. Le plus redoutable des députés de l’opposition, celui qui portait dans toute question ses admirables instincts d’homme d’affaires et de gouvernement, Casimir Perier, prit acte de la reconnaissance officielle de la congrégation, dont l’existence avait été si souvent niée, et dans une séance suivante, il constata que, de l’aveu du ministre des cultes, sept grands séminaires se trouvaient sous la direction d’une société qui n’était pas autorisée.

A la chambre des pairs, lorsque le budget fut débattu, ce fut M. Lainé qui souleva de nouveau la question de légalité. Par l’élévation