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de l’art la souche, la terre et le phylloxéra. Cependant, six mois après, paraît un article ou rapport, avec l’analyse du sol et du sous-sol jusqu’à la cinquième décimale. Comme conclusion de cette œuvre éminemment scientifique, il est dit que ce cas est d’une appréciation difficile, mais qu’il est infiniment probable que le taylor, s’il succombe, ce qui n’est pas certain, succombera, non au phylloxéra, mais au défaut d’adaptation au sol et au climat. »

Sous cette forme humoristique, qui laisse entière la sincérité des personnages fictifs mis en scène, il y a assurément un fond de vérité. Pour les cépages compromis, un certain nombre de terrains se trouvent ainsi éliminés en attendant qu’ils le soient tous ; car, lorsque la mort d’une vigne se trouve quelque part n’être qu’une question de terrain, elle est bien près de n’être plus partout qu’une question de temps. C’est quelque chose sans doute que gagner du temps. En disputant sur quelques espèces condamnées d’avance, on sauve les autres de la controverse ; en défendant pied à pied les postes avancés, on retarde l’assaut du corps de place. Mais pour tout observateur impartial, il n’y a au fond de ces chicanes qu’une entrave à des recherches très importantes d’où dépend une bonne classification de ces cépages au point de vue de la résistance et une appréciation exacte de leur valeur relative. Si le phylloxéra tue un cépage dans un terrain particulier où la catastrophe se trouve précipitée, c’est que le parasite a sur la plante une action qui pourra être faible si d’autres causes ont concouru au dénoûment, mais qui n’en est pas moins certaine, et amènera dans tout autre sol, sinon la mort, au moins un affaiblissement relatif du végétal; si des cépages succombent dans certaines terres, tandis que d’autres vivent dans toutes jusqu’ici, il faut reconnaître chez les premiers une cause intrinsèque de faiblesse qui n’existe pas, ou n’existe qu’à un degré moindre chez les seconds ; et ce qu’on conçoit le mieux, c’est l’opportunité de sacrifier les cépages qui fléchissent ou meurent quelque part, pour s’en tenir provisoirement à ceux qui se conduisent bien partout.

On fera pour les cépages conservés ce qu’on a fait de tout temps pour toutes les plantes cultivées : on recherchera les conditions de climat, de terrain, de culture, où il faut les placer pour en obtenir le plus qu’ils puissent donner. Bien loin de vouloir décourager les études comparatives instituées et poursuivies avec persévérance pour l’étude de cette question très difficile, en elle-même, je crois que ceux qui s’y livreront feront le plus utile emploi de leur temps, à la condition d’observer sans parti-pris et d’interpréter leurs observations et celles des autres, sans se laisser influencer par aucune considération étrangère à la science agricole. Il s’est produit récemment quelques travaux importans dirigés dans cette voie et conçus dans un très bon esprit.

Le rôle des engrais dans la culture des vignes américaines est considérable,