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précision la part qui revient à l’ancien régime en matière d’instruction publique.


I.

On n’a jamais contesté qu’il y eût de florissans collèges et de fameuses universités en France avant la révolution. L’entreprise eût été par trop osée. On s’est contenté, sur le témoignage singulièrement intéressé des parlementaires et des encyclopédistes, de condamner comme rétrograde l’enseignement qui se donnait dans ces collèges et dans ces universités. Les Petites Écoles ont eu moins de bonheur : jusqu’à ces dernières années, on faisait plus que les critiquer, on en niait l’existence, ou, quand on n’allait pas jusqu’à ce point, on les passait complètement sous silence. Lisez tous les rapports officiels qui ont paru de 1830 à 1848, vous y trouverez à peine de loin en loin une allusion à l’ancien régime. Il semble que ce soit à notre époque et principalement à la monarchie de juillet que revienne le mérite d’avoir créé de toutes pièces l’instruction primaire. Longtemps cette opinion, qu’il eût au moins fallu se donner la peine de démontrer, n’a pas trouvé de contradicteurs ; elle était passée à l’état d’axiome, on la subissait sans la raisonner, comme un dogme, on ne la discutait pas.

Cependant tout s’use, même et surtout les dogmes, et, de nos jours, une critique plus pénétrante et plus sévère a révisé bien des jugemens consacrés par une longue prescription et qui avaient pour eux les plus illustres autorités. Assurément cette critique n’est pas à l’abri de tout reproche : elle manque un peu de hauteur et se perd trop souvent dans les infiniment petits. Elle a une fâcheuse tendance à conclure du particulier au général. Enfin, chose plus grave, elle n’est pas toujours suffisamment impartiale. On l’a vue, dans le même temps, entreprendre les plus étranges réhabilitations et poursuivre insidieusement la ruine des plus patriotiques légendes. Mais, parmi tous ces défauts, il lui reste au moins d’avoir exhumé un grand nombre de pièces et de documens qui seront de précieux matériaux pour les historiens à venir et qu’il n’est déjà plus permis de négliger.

C’est ainsi que nous pouvons, grâce aux monographies publiées dans ces dernières années[1], retrouver la trace d’un grand nombre de petites écoles dans les diverses provinces de France. À vrai dire, les auteurs de ces monographies n’ont pas fait une bien grande

  1. Voir pour quelques-uns de ces travaux, dans la Revue du 15 octobre 1879 ; la revue littéraire de M. F. Brunetière.