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tous ses grades dans l’armée régulière, et il est actuellement le plus ancien des lieutenans-généraux au service des États-Unis. Il s’est signalé, pendant la guerre de la rébellion, par son intrépidité et son énergie : il était adoré de ses soldats auxquels il faisait partager son ardeur et sa confiance; les traits d’héroïque bravoure que l’on rapporte de lui composent toute une légende, et, après Grant, personne n’est plus populaire parmi les vétérans de la guerre civile. Envoyé, en 1867, pour prendre le commandement militaire du Texas et de la Louisiane, il s’acquit du premier coup l’affection des hommes du Sud par un ordre du jour demeuré célèbre, où, dans les termes les plus nobles, il faisait appel aux sentimens de conciliation, recommandait l’oubli du passé et garantissait aux vaincus de la veille le libre exercice de tous leurs droits. Depuis lors, le général Hancock a été appelé à commander la circonscription militaire du Nord; il a son quartier-général à New-York, et il s’y est concilié, par la droiture de son caractère, l’estime et les sympathies de tous. Les démocrates ne pouvaient donner une meilleure preuve de leur adhésion aux faits accomplis qu’en prenant pour candidat un de leurs plus glorieux adversaires, un des plus énergiques champions de l’unité nationale. L’impression favorable produite par ce choix fut fortifiée par la lettre d’une concision toute militaire par laquelle le général accepta la candidature et adhéra au manifeste de Cincinnati : cette lettre se terminait par l’engagement « de défendre et de faire respecter l’union et d’assurer dans toutes ses parties la fidèle exécution des lois. » On essaya d’accréditer le bruit que, s’il était élu, il appuierait une proposition à l’effet de mettre à la charge du trésor fédéral les dettes contractées par le gouvernement des rebelles et d’accorder des pensions aux anciens soldats de l’armée confédérée. Le général démentit cette imputation et s’expliqua sur la rébellion et ses promoteurs avec une netteté qui lui fit d’autant plus d’honneur qu’à parler avec cette franchise, il s’exposait à blesser les susceptibilités et à déconcerter les espérances de beaucoup d’hommes du Sud. Enfin, les journaux républicains avancèrent qu’en 1877 le général avait offert à M. Tilden de le faire proclamer président à New-York et de le faire soutenir par les troupes placées sous son commandement, et qu’avertis de ses menées, le général en chef et le président Grant avaient songé à le déplacer. Le général renvoya ses calomniateurs au général Sherman, en demandant à celui-ci de publier la correspondance qu’il avait échangée à cette époque avec le ministère de la guerre. Le général Sherman crut que la loyauté envers un de ses compagnons d’armes l’obligeait à publier cette correspondance : elle démontra que le général avait fait son devoir, qu’il avait exactement renseigné le gouvernement et fidèlement