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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




30 juin.

Tout se ressent visiblement aujourd’hui dans nos affaires de France d’une certaine indécision confuse qui tient à la fin d’une législature et à rapproche d’une grande consultation publique, à cette transition qui se prépare, qui avant de s’accomplir est déjà dans toutes les préoccupations. Les débats sur le mode de scrutin dans les élections prochaines ont été la dernière bataille sérieuse, décisive, mettant en présence les opinions, les ambitions et les intérêts. Depuis que la question a été tranchée par le sénat, tout s’est apaisé. L’émotion même qui s’était un instant manifestée au lendemain du vote, qui a cherché à se traduire en résolutions d’impatience, cette émotion s’est promptement dissipée devant l’indifférence du pays.

Que reste-t-il ? À côté des grands intérêts publics qui se développent sans bruit et des questions d’un ordre international qui suivent leur cours à travers tout, à côté de ces affaires d’Afrique et de Tunis qui ne laissent pas de préoccuper vaguement l’opinion, il reste une situation parlementaire fatiguée, usée, où des pouvoirs près de se séparer achèvent de régler assez confusément leurs comptes. Le sénat, qui, lui, ne doit être renouvelé qu’au mois de janvier, qui aura l’occasion de se retrouver au Luxembourg tel qu’il est, le sénat garde l’esprit plus libre pour discuter sur la loi de l’enseignement obligatoire et laïque qui est loin d’être finie, sur la loi de l’avancement dans l’armée, qui entre à peine dans la première phase des épreuves parlementaires. Le sénat fait encore bonne contenance. La chambre des députés, qui sent venir sa mort prochaine, vide les portefeuilles de ses commissions avec plus d’impatience que de suite, le regard toujours tourné vers le scrutin qui s’ouvrira bientôt, avant trois mois. Elle accumule à son ordre du jour projets, motions, amendemens qui peuvent avoir un intérêt électoral, qui passent ou restent en chemin, peu importe. La chambre, épuisée et distraite, ne retrouve peut-être un peu de feu que pour quelque interpellation comme celle à laquelle le gouvernement a aujourd’hui même