Le volume des Destinées abonde en vers psychologiques de ce genre :
Toujours voir serpenter la vipère dorée,
Qui se traîne en sa fange et se croit ignorée,
Toujours ce compagnon dont le cœur n’est pas sûr :
La femme, enfant malade et douze fois impur…
Ce qui n’empêche pas les cris superbes d’éclater, comme dans la Mort du loup :
Comment on doit quitter la vie et tous ses maux,
C’est vous qui le savez, sublimes animaux,
A voir ce que l’on fut sur terre et ce qu’on laisse,
Seul le silence est grand, tout le reste est faiblesse.
Et les grandes perspectives de s’ouvrir :
Une peur inconnue accable la nature,
L’orage tonne au loin, le bois va se courber.
De larges gouttes d’eau commencent à tomber,
Le combat se prépare et l’immense ravage,
Entre la nue ardente et la forêt sauvage.
Au seul point de vue de la forme, il aura des rencontres pleines d’intérêt :
Le soleil et le vent, dans ces bocages sombres,
Des feuilles sur son front faisaient flotter les ombres.
N’est-ce pas de l’André Chénier le plus pur, comme c’était tout à l’heure du Bernardin de Saint-Pierre ? Tournez quelques feuillets, et vous verrez le romantisme s’accentuer dans le poème de Roland, où le mouvement de la Légende des siècles est déjà pressenti et la note donnée :
Tranquilles cependant, Charlemagne et ses preux
Descendaient la montagne et se parlaient entre eux.
A l’horizon déjà, par leurs eaux signalées,
De Luz et d’Argelès se montraient les vallées.
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À ces vers, où le pittoresque abonde, et tout romantiques d’allure et de perfection, j’en opposerais volontiers quelques-uns de Racine, également admirables dans leur forme abstraite classique :
Ariane, ma sœur, de quel amour blessée
Vous mourûtes aux bords où vous fûtes laissée !